Air France : le plan Ben Smith pour passer la crise

photo François Robardet, Administrateur Air France-KLM I Lettre de l'Administrateur Air France-KLM

François Robardet Représentant des salariés et anciens salariés actionnaires PS et PNC

N°751, 13 avril 2020  
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Editorial

Chères lectrices, chers lecteurs

En fin de lettre, vous retrouverez un long entretien avec le philosophe Edgar Morin. La crise épidémique, nous dit-il, doit nous apprendre à mieux comprendre la science et à vivre avec l’incertitude. Et à retrouver une forme d’humanisme.  

Continuons à respecter les mesures de confinement.
Bonne lecture
François


La Revue de Presse du lundi

> Air France : le plan Ben Smith pour passer la crise

(source La Tribune) 10 avril - Tout va très vite. Les hypothèses de programme des vols présentées en interne à Air France la semaine dernière ne tiennent déjà plus. Alors que la quasi-totalité de la flotte d'Air France et de KLM est clouée au sol, il était encore question d'assurer une offre très ambitieuse en juillet et en août : remettre en ligne 70 à 80% de l'offre en sièges long-courriers initialement prévue cet été avant la crise du Covid, 80 à 90% sur le moyen-courrier et 65 à 75% sur le court-courrier. Sans surprise, ces hypothèses ne tiennent plus. Le directeur général d'Air France-KLM, Ben Smith, l'a indiqué ce vendredi à des  pilotes lors d'une visioconférence. Après une activité minimale en juin où seulement 20% de la capacité globale pourraient être assurés, Ben Smith compte remettre en service en juillet 40% de l'offre (en sièges kilomètres offerts) initialement prévue avant la crise, puis 60% en août, avant d'atteindre 75% au quatrième trimestre au mieux. Ce qui semble encore terriblement ambitieux, au moins pour cet été. Comme beaucoup, le directeur général d'Air France-KLM prévoit une reprise lente et progressive. Pour Ben Smith, il faudra deux ans pour revenir au même niveau que 2019.
 
La situation est critique. Air France-KLM perd 25 millions d'euros par jour. (...) Selon nos informations, Air France perd entre 500 et 600 millions d'euros par mois (hors prise en charge par l'État du chômage partiel). C'est ce qui a été présenté récemment aux représentants du personnel. Le tout pour une trésorerie de 1,5 milliard d'euros (KLM a le même niveau et Air France-KLM dispose d'environ 2,5 milliards).
 
Le groupe a besoin une aide extérieure pour se renflouer. "En l'absence de financements complémentaires, un besoin de liquidité est attendu au troisième trimestre 2020", a prévenu Air France-KLM jeudi dans son communiqué, précisant qu'il s'agissait là de ses "meilleures estimations". "En conséquence, le groupe Air France-KLM, Air France et KLM, mènent des discussions approfondies avec leurs gouvernements respectifs et des institutions financières afin de disposer des ressources qui leur permettront de sécuriser et soutenir les niveaux de liquidités adéquats, par tous les moyens", avait précisé le le groupe.
 
Des négociations sont en cours avec les États français et néerlandais pour obtenir des prêts garantis. Il y a deux demandes à l'État français. L'une vise à obtenir des liquidités pour passer la crise à court terme (4 à 5 mois), l'autre est destinée à couvrir les 12 à 18 prochains mois.
 
Problème. Les banques sont réticentes à prêter avec une garantie de l'État sur 75% des prêts. Selon les pilotes, Ben Smith chercherait à obtenir un niveau de cash non plafonné garanti à 90% par l'État. Le dirigeant canadien serait hostile à une nationalisation d'Air France qui ne serait pas une réponse aux besoins de cash du groupe à court terme, a-t-il dit aux pilotes.
 
Le faible niveau de capacités prévu d'ici à la fin de l'année va provoquer du sureffectif et un nombre trop important d'appareils. Mais si l'État garantit les prêts à Air France, il pourrait exiger au groupe de ne pas licencier. Pour l'heure, la direction ne prévoit pas de licenciements. Le quart de la flotte pourrait néanmoins être supprimé d'ici à la fin de l'année. Si les deux prochains A350 seront livrés en mai et juin, aucune décision n'a été prise pour le dernier B787 et les deux A350 prévus pour être livrés au quatrième trimestre. Pour l'heure, les prises de livraison des premiers A220 à l'automne 2021 restent inchangées. Ben Smith a bien l'intention d'anticiper la sortie de flotte des A380.

Mon commentaire : Les chiffres mentionnés dans l'article sont à prendre avec réserve. Ils auraient été mentionnés lors d'une visioconférence entre la Direction Générale et un millier de pilotes d'Air France.

Plus fiables sont les éléments ci-dessous qui ont fait l'objet d'un communiqué de presse du Groupe Air France-KLM.

Depuis le début de la crise, le Groupe Air France-KLM a pris des mesures importantes : des réductions de coûts estimées à ce stade à 500 millions d'euros en 2020, une révision du plan d'investissement d’au moins 700 millions d’euros en 2020. Le Groupe a part ailleurs négocié avec les loueurs d'avions des reports de paiements, avec les gouvernements des reports de paiement de taxes (aviation civile, solidarité…), de cotisations sociales et de diverses redevances.

Air France et KLM ont chacune pris des dispositions pour gérer la diminution d'activité de leurs salariés, dispositions qui devraient engendrer une économie évaluée à 1,1 milliard d’euros en 2020.

"Nos meilleures estimations actuelles mettent en évidence qu’en l’absence de financements complémentaires un besoin de liquidité est attendu au troisième trimestre 2020. En conséquence, le Groupe Air France-KLM, Air France et KLM, mènent des discussions approfondies avec leurs gouvernements respectifs et des institutions financières afin de disposer des ressources qui leur permettront de sécuriser et soutenir les niveaux de liquidités adéquats, par tous les moyens notamment dans le cadre de l’Encadrement Temporaire de la Commission européenne relatif aux aides d'État publié le 19 mars 2020."

> Un ensemble de prêts est-il vraiment la bouée de sauvetage pour Air France-KLM ?

(source Het Financieele Dagblad traduit avec Deepl) 10 avril - Le sauvetage de la compagnie Air France-KLM approche.  Le scénario privilégié est un ensemble de prêts de 6 milliards d'euros avec une garantie de l'État. Mais il existe d'autres options, telles que l'augmentation de capital, la nationalisation ou le dégroupage total. (...)
 
La question est de savoir combien de temps l'entreprise peut survivre. Air France-KLM brûle rapidement de l'argent. Bruno Le Maire, le ministre français des finances, a déclaré mercredi avec un sentiment de drame que la société perd "des milliards par mois" en raison de la crise du coronavirus. Cela semble exagéré. Un besoin de liquidités d'environ 1 milliard d'euros par mois semble plus proche de la vérité. (...)
 
Paris et La Haye semblent se diriger vers un prêt. (...) Mais il existe plusieurs options financières.
 
1 Un ensemble de prêts de 6 milliards d'euros 
En raison des problèmes actuels de l'aviation, la trésorerie d'Air France-KLM a été sérieusement affaiblie. Elle était de 6,6 milliards d'euros à la mi-mars, mais elle sera bientôt à zéro car la quasi-totalité de la flotte est immobilisée au sol.

Dans ce scénario, Air France recevra environ 4 milliards d'euros et KLM 2 milliards d'euros. (...) La dette nette du groupe à la fin de l'année dernière s'élevait à plus de 6 milliards d'euros. Dans le scénario où 1 milliard d'euros est perdu par la société chaque mois, cette dette peut atteindre 18 milliards d'euros. Par rapport à l'Ebitda de 2019, le taux d'endettement serait alors extrêmement élevé, surtout si une compagnie aérienne plus petite doit être intégrée dans le futur.
 
2 Un appel aux actionnaires 
Les actionnaires sont les États néerlandais et français, chacun pour environ 14 %. En outre, China Eastern et la compagnie aérienne américaine Delta Airlines en détiennent chacune 9 %. Les actionnaires pourraient mettre de l'argent supplémentaire dans l'entreprise pour répondre aux besoins.
 
Mais dans le cas d'Air France-KLM, ce serait difficile. Les États néerlandais et français ont un intérêt majeur dans ce domaine, mais China Eastern et Delta Airlines sont dos au mur. Ils n'ont aucun moyen d'apporter des capitaux.
  
3 Une injection de capital par les États néerlandais et français 
Paris et La Haye pourraient effectuer conjointement une injection de capital de 6 milliards d'euros. Cela aussi serait une histoire complexe, car à la valeur marchande actuelle de plus de 2 milliards d'euros, les autres actionnaires verraient bientôt leur participation diluée par un facteur de quatre. (...) En bref, il semble peu probable que cette option soit retenue.
 
4 Nationalisation 
La nationalisation d'une compagnie aérienne (...) signifierait un retour aux années 80, à l'ère de la réglementation. Et est-ce que cela respecterait les règles européennes de la concurrence ? (...)
 
Si Air France-KLM était nationalisée, quelque 1,5 milliard d'euros devraient d'abord être affectés au rachat des 70 % des parts des autres actionnaires. A cela s'ajouterait l'augmentation de 6 milliards d'euros du capital d'Air France-KLM.
 
Pour la compagnie aérienne, la nationalisation serait financièrement intéressante et offrirait plus de sécurité. Mais est-ce vraiment faisable politiquement ? Les États y attacheront des conditions strictes. Mais les besoins sont importants et de nombreux emplois, quelque 80.000 au total, sont en jeu.
 
5 Retour à deux sociétés 
Immédiatement après le déclenchement de la crise du coronavirus, il a déjà été suggéré aux Pays-Bas que les deux compagnies aériennes soient à nouveau indépendantes. Certes, il y a beaucoup de grognements du côté de KLM à propos des relations difficiles avec les Français. Mais dans la crise actuelle, les contradictions semblent être reléguées au second plan. Pieter Elbers n'a laissé aucun doute la semaine dernière : il n'y a de dégroupage dans aucun scénario.

Mon commentaire : Plusieurs solutions s'offrent aux États français et néerlandais pour soutenir Air France-KLM. Elles sont identiques à celles envisagées pour aider la plupart des compagnies aériennes dans le monde.

Si l'on excepte les aides directes accordées pour payer tout ou partie des salaires, une seule compagnie aérienne a pour l'instant bénéficié de mesures concrètes. Il s'agit de Singapore Airlines qui a obtenu 10 milliards de dollars provenant de ses actionnaires. Les autres, dont Air France-KLM, sont en négociation avec les Etats et les banques.

> Chute de 56,6% du nombre de passagers pour Air France-KLM en mars

(source AFP) 9 avril - Le nombre de passagers transportés par le groupe Air France-KLM s'est effondré de 56,6% en mars, par rapport à la même période il y a un an, en pleine expansion mondiale du coronavirus, a annoncé le groupe jeudi.
 
Pour avril et mai 2020, le transporteur prévoit "que plus de 90% de la capacité prévue sera suspendue" en raison des restrictions de voyage imposées au niveau mondial et les deux compagnies du groupe "ont l'intention de continuer à desservir des paires de villes clés à partir de leurs hubs respectifs" d'Amsterdam-Schiphol et Paris-Charles-de-Gaulle, sous forme d'opérations réduites, selon un communiqué.
 
En mars, Air France, KLM et Transavia, la low-cost du groupe, ont opéré "des vols spéciaux pour rapatrier les citoyens dans leur pays d'origine, en étroite collaboration avec les gouvernements français et néerlandais", précise le groupe.
 
Air France-KLM précise ne pas être en mesure de fournir des informations au-delà de mai 2020, "en raison du niveau élevé d'incertitude sur la durée de la crise" et ajoute qu'il "suit l'évolution de la situation au quotidien en évaluant en conséquence si des ajustements complémentaires sont nécessaires sur le réseau". (...)
 
Le groupe a précisé qu'il allait "suspendre les communiqués de trafic mensuels jusqu'à nouvel ordre en raison des fortes réductions de capacité liées au Covid-19". (...) 

Mon commentaire : Durant les prochaines semaines, la communication du groupe Air France-KLM portera essentiellement sur la gestion de la crise.

Si vous êtes actionnaires du groupe Air France-KLM, vous recevrez également sa communication institutionnelle en vue de la prochaine Assemblée générale. Elle se tiendra le 26 mai 2020 à l’Espace Grande Arche – La Défense.

> Congo : Un avion de rapatriement d’Air France touché par des tirs

(source AFP) 12 avril - Samedi soir, un avion de rapatriement d’Air France a été endommagé par des tirs sur l’aéroport de Pointe-Noire au  Congo. Aucun blessé après ces tirs, car l’avion n’avait ni équipage ni passager, le vol pour la France étant prévu ce dimanche.
 
« L’appareil était à l’arrêt à son point de stationnement lors de l’incident, sans équipage ni passagers à son bord », a indiqué Air France dans un communiqué. Une source proche du dossier a indiqué à l’AFP que l’appareil avait subi des impacts de balles, sans pouvoir préciser les circonstances. (...)
 
L’appareil « devait effectuer un vol de rapatriement entre Pointe-Noire, Bangui et Paris-Charles de Gaulle dimanche […]. Le vol dont le départ était initialement prévu à 10h [heure locale] est reporté de 24 heures afin de permettre d’acheminer un appareil de remplacement [Boeing 777-200] et un équipage depuis Paris-Charles de Gaulle », a expliqué la compagnie. (...)
 
« Apparemment » l’incident est « lié à une altercation et à un désaccord entre un agent de la DGST [Direction générale de la surveillance du territoire] et son chef. L’agent qui a tiré était sous l’emprise de l’alcool. C’était un tir à la Kalash en l’air qui a touché l’avion », a indiqué une source proche du dossier sous couvert de l’anonymat.

> Lufthansa ne voit pas de retour à la normale avant des années et s'impose une cure d'amaigrissement drastique

(source La Tribune) 7 avril - Face à la crise du Covid-19, le groupe Lufthansa (Lufthansa, Austrian Airlines, Swiss, Eurowings, Brussels Airlines), continue de prendre des mesures fortes plus rapidement que ses concurrents. (...)

Les mesures prises pour passer le "shutdown" étant prises et les négociations avec le gouvernement allemand en cours pour obtenir une aide de plusieurs milliards d'euros, le groupe allemand se projette déjà dans la période d'après. (...) Contrairement aux prévisions de l'association internationale du transport aérien (IATA), qui tablent sur une reprise en 2021, Lufthansa "ne s'attend pas à un retour rapide du secteur du transport aérien au niveau d'avant la crise", déclare le groupe dans un communiqué. La "levée totale des restrictions de voyage durera des mois" et le retour de la demande à la normale "des années", précise-t-il.
 
Selon nos informations, certains en interne chez Lufthansa ne s'attendent pas à un retour de la demande au niveau de 2019 avant quatre à cinq ans. Par ailleurs, selon un document interne à Lufthansa Technick que Lufthansa n'a pas voulu commenter à part dire que ce n'était pas "une publication officielle", la situation actuelle pourrait durer jusqu'à fin septembre, et la remise en service des capacités ne commencerait réellement qu'à partir d'octobre avec une remise en vol lente des appareils permettant d'atteindre entre 25% et 75% (au mieux) des capacités d'ici à décembre. (...)

Lufthansa va réduire fortement la taille de sa flotte en se séparant définitivement de 42 appareils, notamment de nombreux gros-porteurs (six A380 d'ici à 2022, cinq B747-400, sept A340-600, trois A340-300) et 21 avions court et moyen-courriers A320. (...)
 
Par ailleurs, la société Germanwings va fermer (la marque n'existe plus depuis 2015) et ses opérations seront intégrées à Eurowings, comme cela a déjà  annoncé il y a plusieurs années. Les activités long-courriers d'Eurowings seront réduites. Swiss et Austrian ne seront pas épargnées par la restructuration. Leurs flottes seront également réduites.
 
Lufthansa n'a pas détaillé l'impact sur l'emploi de cette restructuration mais a promis que "l'objectif" était de "garder le plus d'emplois possible". (...)

Mon commentaire : La réduction de flotte annoncée par Lufthansa (-10% de la flotte de la maison-mère) est moins spectaculaire qu'il n'y parait. Cependant, elle reflète la perception des dirigeants de Lufthansa : la sortie de crise sera lente.

> EasyJet reporte la livraison de 24 Airbus

(source Le Journal de l'Aviation) 10 avril - Voilà une nouvelle qui pourrait faire un petit peu plaisir à Stelios Haji-Ioannou, l'actionnaire principal d'easyJet, mais qui a tout de même peu de chance de l'amadouer. La compagnie a annoncé avoir conclu un accord avec Airbus pour reporter la livraison de vingt-quatre appareils prévue en 2020, 2021 et 2022. De quoi soulager une partie de la pression qui pèse sur ses liquidités. (...)
 
EasyJet a également un autre levier sur lequel s'appuyer pour s'assurer de la flexibilité : ses contrats de leasing. Elle en compte vingt-quatre qui sont renouvelables, ou non, durant les seize prochains mois. Elle estime pouvoir ainsi réduire ses capacités pour s'adapter à la baisse drastique de la demande à la suite de la crise du Covid-19 et va pouvoir éviter des dépenses importantes (les avances sur le paiement des A320neo). Le plan de flotte sera exposé plus en détail le 16 avril.
 
En parallèle, le groupe a répondu favorablement à une nouvelle demande d'organisation d'assemblée générale déposée le 8 avril. Initiée par Stelios Haji-Iaonnou, elle vise à destituer le directeur non-exécutif Andreas Bierwirth et le directeur financier Andrew Finlay de leurs fonctions et, surtout, à faire annuler une commande de 107 monocouloirs d'Airbus.

Mon commentaire : La situation d'easyJet interpelle. Son fondateur et principal actionnaire (avec un tiers des parts) fait tout pour percevoir des dividendes en 2020.

Pourtant, le gouvernement britannique a prévenu qu'il n'aiderait pas les compagnies aériennes qui verseraient des dividendes à leurs actionnaires. Rappelons qu'easyJet a indiqué avoir bénéficié d'un prêt de 600 millions de livres du Trésor et de la Banque d'Angleterre.

La prochaine assemblée générale de la compagnie d'easyJet sera riche d'enseignements sur l'avenir de la compagnie britannique.

> Ryanair sans remboursement, contre l’aide à Austrian Airlines

(source Air Journal) 10 avril - (...) Initialement félicitée pour sa politique de remboursement des vols annulés conformément à la directive EU261, la spécialiste irlandaise du vol pas cher semble se ranger à l’avis des transporteurs qui trouvent cela trop dangereux pour leur trésorerie et préfèrent proposer des avoirs. Depuis quelques jours, des passagers de Ryanair ont reçu des courriels expliquant qu’elle ne  « pourra pas traiter les demandes de remboursement » avant la fin de la crise sanitaire. Ses employés en charge des paiements « sont tenus de rester à la maison dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, et des restrictions de sécurité des paiements nous empêchent de traiter les remboursements en espèces jusqu’à la fin de la crise », explique Ryanair selon les passagers qui ont reçu le courriel. (...)
 
En Autriche, la filiale Lauda Air a demandé au gouvernement de ne pas fournir d’aide à la compagnie nationale Austrian Airlines, expliquant que les contribuables autrichiens « ne devraient pas subventionner une compagnie allemande. (...) Nous ne pensons pas que Lufthansa devrait recevoir des aides d’État des contribuables autrichiens exactement de la même manière que nous ne pensons pas que Ryanair devrait recevoir des aides d’État des contribuables autrichiens », a déclaré le CEO de Lauda Air Andreas Gruber à l’agence Reuters. Et si Austrian Airlines reçoit finalement une aide d’état, alors la low-cost demandera la même chose – au nom de ses 550 employés autrichiens. (...)

> Norwegian Air veut restructurer sa dette

(source Reuters) 8 avril - La compagnie aérienne Norwegian Air, dont la quasi-totalité de la flotte est clouée au sol en raison des restrictions liées à la pandémie de coronavirus, a proposé mercredi de convertir une partie de sa dette en actions et d'émettre des actions nouvelles pour pouvoir rester à flot.
 
En faisant cela, la compagnie norvégienne à bas coût pourrait par ailleurs bénéficier de garanties publiques pouvant atteindre trois milliards de couronnes norvégiennes (environ 265 millions d'euros) qui sont conditionnées à la réduction du ratio dette sur capitaux propres.
 
Pionnière en 2013 des liaisons transatlantiques "low-cost", Norwegian est rapidement devenue la première compagnie étrangère desservant la région de New York et un acteur majeur dans d'autres aéroports américains. Mais cette expansion s'est faite au prix d'une dette et d'engagements représentant fin 2019 près de huit milliards de dollars.
 
Le mois dernier, Norwegian a décidé de mettre au chômage technique près de 90% de ses salariés, soit 7.300 personnes, tout en sollicitant l'aide des autorités norvégiennes, disant avoir besoin de liquidités "dans des semaines, pas des mois".
 
"Norwegian veut renforcer son bilan en convertissant de la dette en actions pour répondre aux exigences du programme de garantie de l'État norvégien et créer une plate-forme durable", a déclaré mercredi le groupe dans un communiqué.
 Une assemblée générale extraordinaire se tiendra le 4 mai pour approuver ce projet, a-t-il ajouté.

Mon commentaire : Chaque pays en Europe doit-il encore disposer de sa compagnie nationale ? La question se pose au moment de soutenir une compagnie aérienne (Norwegian) en grandes difficultés avant la crise. D'autant plus qu'elle subit la concurrence de SAS, qui dispose de trois bases en Scandinavie (Oslo, Stockholm et Copenhague), avec un chiffre d'affaires identique mais avec de meilleurs résultats.

En temps de crise, il peut paraitre réconfortant de disposer d'un transporteur national, public ou privé, pouvant ramener ses concitoyens partis en vacances à l'autre bout du monde, ou disposé à aller chercher du matériel médical. Mais n'importe quel autre transporteur ayant cloué ses avions au sol serait prêt à en faire de même. On le constate en France, où des régions ont affrété des compagnies du Golfe pour transporter du matériel médical entre la Chine et la France.

> Coronavirus: Ethiopian Airlines a déjà perdu un demi-milliard de dollars

(source AFP) 7 avril - Ethiopian Airlines, la première compagnie aérienne d'Afrique, a déjà perdu un demi-milliard de dollars et fermé la plupart de ses lignes passagers depuis le début de la pandémie de nouveau coronavirus. (...)
 
Pour affronter cette crise, a expliqué son PDG M. Tewolde, la compagnie va concentrer ses efforts sur le fret, dont l'approvisionnement en équipement médical, et pourrait aller jusqu'à enlever les sièges passagers de certains de ses avions. L'activité fret ne représente toutefois encore que 15% des revenus d'Ethiopian Airlines, a reconnu son PDG. (...)
 
M. Tewolde s'est dit confiant en la capacité de la compagnie, propriété de l'État éthiopien, à résister à la tempête sans avoir à licencier aucun de ses 13.000 employés réguliers.
 
Mais il n'a pas exclu qu'elle ait besoin d'une aide financière extérieure pour se maintenir à flot. "Notre plan est de résister et passer cette crise seuls, mais si malheureusement elle se prolonge au-delà de ce qu'on imagine, nous verrons ça le moment venu", a-t-il déclaré. (...)

> Malaysia Airlines : une offre de 2,5 milliards de dollars

(source Air Journal) 8 avril - Afin de reprendre intégralement la société holding Malaysia Aviation Group (MAG) propriétaire de la compagnie nationale malaisienne, Golden Skies Ventures Sdn Bhd (GSV) a affirmé le 7 avril 2020 avoir obtenu « plus de 2,5 milliards de dollars » auprès d’une banque européenne non précisée. Interrogé par Reuters, le CEO de GSV Shahril Lamin a estimé qu’il lui faudra « trois ou quatre mois » pour obtenir le financement à long terme, une « société japonaise de capital-investissement » étant prête à injecter des fonds « immédiats » dans le groupe Malaysia Airlines « par le biais d’un accord de participation ». (...)
 
Fondé par d’anciens responsables de Malaysia Airlines et des professionnels ayant une expérience de l’aviation, GSV aurait soumis il y a un mois sa proposition à la banque Morgan Stanley, embauchée par Kazanah pour gérer la vente de la compagnie qui ne s’est jamais remise de la perte successive de deux avions en 2014 – un disparu dans l’Océan indien (vol MH370) et l’autre abattu au-dessus de l’Ukraine (vol MH17). (...)
 
Khazanah Nasional Bhd n’est pas convaincu par l’offre : selon le Daily Express, le fonds souverain est sceptique sur la proposition, affirmant que Golden Skies « n’a pas été en mesure de prouver sa source de financement ». Selon son directeur général Shahril Ridza Ridzuan, il serait « prudent » de savoir si l’offre a été faite avec un soutien financier, compte tenu de la crise mondiale des compagnies aériennes et de l’aversion au risque de crédit en cette période. « De plus, leur proposition initiale repose à 100% sur le financement par emprunt de tiers. Ils n’ont pas de capitaux propres », a-t-il souligné.
 
Depuis la mi-mars, Malaysia Airlines a suspendu plus de 4000 vols et prévu de conserver une capacité réduite jusqu’à la fin juin, supprimant en particulier tous les vols hors Jakarta en Asie du Sud-est et la plupart de ses rotations vers Londres. Elle a aussi demandé à ses employés de prendre trois mois de congés sans solde.

> Les sociétés de leasing s'attendent à une baisse des prix et du nombre de locations d'avions

(source Le Journal de l'Aviation) 6 avril - Le secteur du leasing se prépare lui aussi à subir les effets de la crise liée à la pandémie de covid-19. Une étude réalisée par IBA et Split Rock Aviation indique que les taux et les valeurs des appareils devraient diminuer dans les mois à venir et que la physionomie du marché devrait être modifiée, avec une forte augmentation des fins de contrats, en raison des difficultés énormes que rencontrent actuellement les compagnies aériennes. (...)
 
Pour la première fois depuis plus de trente ans, les fins de lease devraient être plus nombreuses que les nouveaux contrats, poussées par l'augmentation naturelle des échéances de bail et les faillites à venir. IBA estime que les appareils remis sur le marché dans le cadre de faillites de compagnies aériennes pourraient dépasser les 425 en 2020 et frôler les 600 en 2021.
 
En ce qui concerne les nouveaux accords, ils devraient considérablement chuter, sauf ceux de crédit-bail, qui répondent au besoin de liquidités des compagnies aériennes - comme l'illustre l'accord de « sale and lease back » conclu par Cathay Pacific en mars avec BOC Aviation pour six de ses Boeing 777-300ER. (...)
 
« La situation va être assez difficile pour les sociétés de leasing », estime Phil Seymour. Si BOC Aviation ne semble pas s'inquiéter et avoir une confiance totale en son bilan, Avolon a déjà commencé à prendre des mesures pour se protéger. La société irlandaise a annoncé l'annulation de commandes pour 75 Boeing 737 MAX, dont les livraisons étaient prévues pour 2020-2023, et le report de seize autres appareils à 2024 et au-delà. De même, quatre A330neo attendus pour 2021 ont été annulés et neuf Airbus de la famille A320neo ont été repoussés à 2027. Elle indique que 80% de sa base clients l'a contactée pour demander des mesures de soulagement, principalement des reports à court terme de paiement.

Mon commentaire : Si les plus importantes sociétés de location d'avions disposent des liquidités suffisantes pour résister à la crise, il n'en va pas de même pour les plus petites d'entre elles. On pourrait assister, comme pour les compagnies aériennes, à une consolidation du secteur.

> Le fret aérien ne connaît pas la crise

(source Le Journal du Dimanche) 12 avril - (...) Première plateforme de fret aérien en Europe, Roissy dispose de 80 postes d’avions cargos sur une zone équivalente à un terminal de 45 millions de passagers. « Le fret aérien ne pèse que 2 % des volumes de marchandises transportées dans le monde, reconnaît Edward Arkwright, directeur général exécutif d’ADP, mais en valeur, cela représente 35 %. » Tout ce qui est cher prend l’avion : les pièces d’aéronautique, les téléphones portables neufs, les ordinateurs, les chevaux de course et, bien sûr, les accessoires de luxe made in France.

Pour les grandes maisons, le terminal cargo enregistre même une pointe d’activité le week-end. « Fabriquée dans la semaine, la marchandise est envoyée directement vers l’Asie entre le samedi et le dimanche », explique Henri Le Gouis, directeur pour l’Europe de Bolloré Logistics. (...)
 
L’activité économique est en train de repartir en Asie, explique Édouard Mathieu, directeur cargo chez ADP. « La demande est là pour des produits frais, mais aussi des composants industriels, des articles de luxe... ». (...) Air France aussi s’est relancé dans la partie. Le transporteur français va opérer mardi un vol inédit avec un avion passager rempli de marchandises - de la soute à la cabine - avec des colis de matériel médical coincés entre les sièges, dessus, et jusque dans les coffres à bagages. Ce trajet Hongkong-Paris-Hongkong signe aussi le retour d’Air France sur l’activité fret avec la Chine (...) explique Christophe Boucher, directeur du cargo chez Air France, une activité qui pesait l’an dernier 800 millions d’euros de chiffre d’affaires.
 
Ces recettes sont stratégiques pour des compagnies en mal de trésorerie, acculées par une crise mondiale inédite, et condamnées comme Air France à solliciter une aide financière de l’État. Dans ce contexte, le prix au kilo transporté - entre 1,50 et 2,50 euros - est devenu une source de cash inestimable. Des dizaines de compagnies aériennes ont décidé de faire voler leurs avions passagers avec du fret. « Cela nécessite parfois de négocier des autorisations spéciales avec les États car les créneaux accordés pour le transport de passagers ne sont pas les mêmes que pour le fret », précise Mathias Lepeut, patron de l’activité cargo pour Qatar Airways en Europe. Pour les compagnies, faire tourner ces avions et leurs pilotes est plus rentable que de supporter leur immobilisation. Mais surtout, garder flottes et équipages en activité facilitera la reprise, le jour où la sortie de la crise sanitaire mondiale le permettra.

Mon commentaire : Pour visualiser l'impact de la crise, je conseille de se rendre sur le site FlightRadar24.

Le résultat est édifiant. Le nombre de vols entre l'Europe et l'Asie est très faible et la plupart sont des vols cargos.

> Le vol de certification des Boeing 737 Max repoussé par la FAA

(source Avions légendaires) 9 avril - Le sort s’acharne vraiment sur le constructeur américain et sur son monocouloir. Ce mardi 7 avril 2020 la Federal Aviation Administration a annoncé que le vol de nouvelle certification de la famille 737 Max n’aurait pas lieu avant au plus tôt le mois prochain. Une annonce qui selon l’avionneur va lui permettre de corriger deux défauts mineurs détectés récemment. Officiellement Boeing espère toujours un retour à la normale d’ici la fin du printemps. (...)
 
Boeing justement a profité de cette annonce de la FAA pour dévoiler la découverte de deux points techniques du logiciel MCAS qui avaient besoin d’être remis à jour. Ça tombe bien ses ingénieurs et techniciens ont un sursis de quelques jours avant le vol de certification. L’un d’eux concerne un risque mince mais bien réel de désengagement involontaire du pilote automatique lors des phases d’atterrissage. (...)
 
Pour mémoire ce vol de certification repoussé à mai 2020 ne concerne que les 737 Max 7, 737 Max 8, et 737 Max 9. Et ce aussi bien dans les versions commerciales classiques que pour les avions d’affaire de type BBJ Max car au final il ne s’agit que de différences d’aménagements intérieurs. Le nouveau 737 Max 10 n’est pas dans la boucle car sa certification est tout bonnement impossible actuellement : il n’a pas encore réalisé son premier vol. Celui-ci est attendu là encore entre la fin du printemps et le début de l’été, si tout va bien.

Mon commentaire : Le B737 Max sera-t-il en mesure de voler lorsque l'activité des compagnies aériennes reprendra ?

En cas de reprise lente, le besoin d'avions neufs sera réduit. Airbus pourrait alors être en capacité de répondre à la majorité des besoins en avions court-courrier.

Si le B737 Max manque le rendez-vous, cela pourrait être catastrophique pour Boeing.

> L'IATA prépare la reprise et appelle à la coordination

(source Le Journal de l'Aviation) 7 avril - Tout en continuant d'appeler les gouvernements et les régulateurs à mettre en place très rapidement les mesures de soutien promises, l'IATA veut préparer le transport aérien à la reprise. (...)
 
L'un des premiers aspects qui devra être réglé sera technique. En effet, plus les opérations sont arrêtées longtemps, plus le redémarrage est difficile. Notamment pour les avions, mais pas uniquement. Les négociations avec les régulateurs sont donc de première importance pour gérer les éventuelles expirations de licences du personnel, des certificats de navigabilité... « Nous devrons avoir des discussions sérieuses et ouvertes avec les régulateurs pour que tous les aspects réglementaires soient sécurisés. Nous n'avons jamais arrêté l'industrie à cette échelle avant donc ce ne sera la première fois que nous remettrons quasiment tout en marche. »
 
L'autre inconnue est « l'adaptation de l'industrie du transport aérien à la réalité post-Covid ». L'IATA est consciente que les autorités voudront s'assurer que tout est fait pour éviter une reprise de la pandémie. Constatant que la Chine a déjà imposé des restrictions qui n'étaient même pas en vigueur au pic de l'épidémie, elle souhaite que les mesures qu'elles estimeront nécessaires soient négociées et coordonnées, qu'il s'agisse de mettre en place de nouveaux contrôles, de prendre la température des passagers ou autre. (...)

Mon commentaire : En sortie de crise, les préoccupations sanitaires pourraient avoir la même importance que les préoccupations environnementales.

L'industrie du transport aérien serait bien inspirée si elle parvenait à prendre des décisions coordonnées dans les deux domaines.

> Des jours meilleurs reviendront...

(source Le Journal de l'Aviation) 7 avril - Le temps s'est désormais arrêté pour le transport aérien mondial et les incertitudes concernant la reprise se transforment de jour en jour en un pessimisme certain, tant les sujets d'inquiétudes semblent s'accumuler pour le secteur et même si l'IATA se montre particulièrement proactive vis-à-vis des compagnies aériennes, des aéroports, des gouvernements et des autorités sanitaires.
 
Car en théorie seulement, la demande n'a pas disparu, mais elle reste intimement liée d'une part à la levée des interdictions et restrictions de voyages de par le monde, alors qu'il n'existe aucun vaccin ni traitement antiviral pour lutter contre le coronavirus, et d'autre part aux conséquences de la crise économique sur les passagers.
 
On peut alors comprendre que toutes les compagnies aériennes mondiales ne seront pas logées à la même enseigne et que cette reprise dépendra beaucoup de la nature des activités des transporteurs. Une compagnie aérienne spécialisée dans les vols de type point à point à l'échelle d'un continent (comme les grandes low-cost mondiales) sera logiquement moins durablement touchée qu'une compagnie disposant d'un modèle économique fortement exposé aux vols intercontinentaux (comme le sont les grandes compagnies traditionnelles).
 
Pire, en se référant aux précédentes crises économiques qui ont eu des conséquences importantes pour le transport aérien, à chaque fois de nombreux passagers voyageant pour raison professionnelle se sont vus déclassés d'une cabine par leur entreprise, impactant alors sensiblement les recettes des compagnies aériennes sur le long-courrier, les passagers « haute contribution » participant grandement à la pérennité commerciale de ce type de vols.
 
Mais un autre sujet d'inquiétudes concerne aussi cette fois directement le comportement des passagers qui pourrait être amené à évoluer au cours des prochains mois. L'image du passager confiné dans une cabine bondée en ces temps de covid-19 n'a jamais été aussi éloignée du bonheur idyllique même si les dernières consignes de l'EASA visant à limiter les risques de contamination en cabine (arrêt de l'air en recirculation, conseils de répartition des passagers pour un plus grand espacement...) sont les bienvenues, mais évidemment transitoires. Autre exemple, de nombreux voyageurs pourraient bien davantage privilégier les vols directs, une tendance qui se fera nécessairement au détriment des modèles économiques basés sur les hubs de correspondance (et donc encore une fois des grandes compagnies aériennes traditionnelles).
 
On l'aura compris, la crise qui commence pour le transport aérien ne s'arrêtera pas avec la reprise d'une grande partie de leur programme de vols. Mais comme vient de l'annoncer la reine Élisabeth II, « des jours meilleurs reviendront ».

Mon commentaire : Quel sera le paysage du transport aérien en 2021 ?

Les passagers modifieront-ils leur comportement ? Les voyages d'affaires diminueront-ils à cause de l'utilisation croissante de la visioconférence ? Assisterons-nous à une accélération de la consolidation ? L'alimentation des hubs par des compagnies à bas coûts deviendra-t-il la norme ? Y aura-t-il un déclin du modèle de hub au profit des liaisons directes ?

Personne n'a la réponse mais tous ces sujets sont sur la table de travail des compagnies aériennes. Les jours meilleurs viendront ... pour les compagnies qui sauront s'adapter rapidement.


Revue de presse boursière ...

> Pétrole : accord "historique" entre les pays exportateurs pour une baisse de la production

(source Capital) 13 avril - Les pays exportateurs de pétrole, Arabie saoudite et Russie en tête, ont convenu dimanche soir d'une baisse de production (...) de l'offre pétrolière de 9,7 millions de barils par jours (mbj) en mai et en juin, a annoncé l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).

Saluant un "ajustement historique" de la production, le secrétaire général de l'Opep Mohammed Barkindo a souligné que cette réduction serait "la plus importante en volume et la plus longue en durée" jamais mise en œuvre par le cartel et ses partenaires. L'organisation menée par l'Arabie Saoudite, qui depuis deux ans coopère avec la Russie, entend en effet appliquer ces quotas jusqu'en mai 2022, en les faisant passer à 7,7 millions mbj au second semestre 2020, puis à 5,8 millions mbj

Alors que les frictions entre Ryad et Moscou, lancés dans une guerre des prix et des parts de marché, avaient dominé ces dernières semaines, c'est un différend avec le Mexique qui bloquait depuis jeudi la réplique souhaitée par la majorité des producteurs.
 
Mexico jugeait excessif l'effort qui lui était réclamé alors que le gouvernement a lourdement investi pour relancer la production. Au final, le pays semble avoir obtenu satisfaction, l'Opep ayant revu un peu à la baisse son objectif d'une coupe de 10 mbj pour mai et juin. (...)
 
"Les prix du pétrole vont se stabiliser, le marché du pétrole se stabilisera et (il) sera la base de la reprise financière, commerciale et économique dans un monde post-pandémique", a affirmé le président Nicolas Maduro. Les analystes en étaient moins assurés, saluant un effort inédit des producteurs mais rappelant que les capacités de stockage arrivaient à saturation et que, dans l'immédiat, la pression baissière risquait de se poursuivre sur le prix du baril. (...)

Mon commentaire : Les pays producteurs de pétrole n'avaient pas le choix. Ils devaient réduire leur production, faute de quoi il aurait été impossible de stocker leur production.


L'article bonus ...

> Edgar Morin: «Nous devons vivre avec l'incertitude»

(source Le journal CNRS) 6 avril - Le philosophe Edgar Morin. « Je ne dis pas que j’avais prévu l’épidémie actuelle, mais je dis par exemple depuis plusieurs années qu’avec la dégradation de notre biosphère, nous devons nous préparer à des catastrophes. »
Confiné dans sa maison à Montpellier, le philosophe Edgar Morin reste fidèle à sa vision globale de la société. La crise épidémique, nous dit-il, doit nous apprendre à mieux comprendre la science et à vivre avec l’incertitude. Et à retrouver une forme d’humanisme.
 
La pandémie du coronavirus a remis brutalement la science au centre de la société. Celle-ci va-t-elle en sortir transformée ?
Edgar Morin : Ce qui me frappe, c’est qu’une grande partie du public considérait la science comme le répertoire des vérités absolues, des affirmations irréfutables. Et tout le monde était rassuré de voir que le président s’était entouré d’un conseil scientifique. Mais que s’est-il passé ? Très rapidement, on s’est rendu compte que ces scientifiques défendaient des points de vue très différents parfois contradictoires, que ce soit sur les mesures à prendre, les nouveaux remèdes éventuels pour répondre à l’urgence, la validité de tel ou tel médicament, la durée des essais cliniques à engager… Toutes ces controverses introduisent le doute dans l’esprit des citoyens.
 
Vous voulez dire que le public risque de perdre confiance en la science ?
E.M. : Non, s’il comprend que les sciences vivent et progressent par la controverse. Les débats autour de la chloroquine, par exemple, ont permis de poser la question de l’alternative entre urgence ou prudence. Le monde scientifique avait déjà connu de fortes controverses au moment de l’apparition du sida, dans les années 1980. Or, ce que nous ont montré les philosophes des sciences, c’est précisément que les controverses font partie inhérente de la recherche. Celle-ci en a même besoin pour progresser.
 
Malheureusement, très peu de scientifiques ont lu Karl Popper, qui a établi qu’une théorie scientifique n’est telle que si elle est réfutable, Gaston Bachelard, qui a posé le problème de la complexité de la connaissance, ou encore Thomas Kuhn, qui a bien montré comment l’histoire des sciences est un processus discontinu. Trop de scientifiques ignorent l’apport de ces grands épistémologues et travaillent encore dans une optique dogmatique.
 
La crise actuelle sera-t-elle de nature à modifier cette vision de la science ?
E.M. : Je ne peux pas le prédire, mais j’espère qu’elle va servir à révéler combien la science est une chose plus complexe qu’on veut bien le croire – qu’on se place d’ailleurs du côté de ceux qui l’envisagent comme un catalogue de dogmes, ou de ceux qui ne voient les scientifiques que comme autant de Diafoirus (charlatan dans la pièce Le Malade imaginaire de Molière, Ndlr) sans cesse en train de se contredire…
 
J'espère que cette crise va servir à révéler combien la science est une chose plus complexe qu’on veut le croire. La science est une réalité humaine qui, comme la démocratie, repose sur les débats d’idées, bien que ses modes de vérification soient plus rigoureux. Malgré cela, les grandes théories admises tendent à se dogmatiser, et les grands innovateurs ont toujours eu du mal à faire reconnaitre leurs découvertes. L’épisode que nous vivons aujourd'hui peut donc être le bon moment pour faire prendre conscience, aux citoyens comme aux chercheurs eux-mêmes, de la nécessité de comprendre que les théories scientifiques ne sont pas absolues, comme les dogmes des religions, mais biodégradables...
 
La catastrophe sanitaire, ou la situation inédite de confinement que nous vivons actuellement : qu’est-ce qui est, selon vous, le plus marquant ?
E.M. : Il n’y a pas lieu d’établir une hiérarchie entre ces deux situations, puisque leur enchaînement a été chronologique et débouche sur une crise qu’on peut dire de civilisation, car elle nous oblige à changer nos comportements et change nos existences, au niveau local comme au niveau planétaire. Tout cela est un ensemble complexe. Si on veut l’envisager d’un point de vue philosophique, il faut tenter de faire la connexion entre toutes ces crises et réfléchir avant tout sur l’incertitude, qui en est la principale caractéristique.
 
Ce qui est très intéressant, dans la crise du coronavirus, c’est qu’on n’a encore aucune certitude sur l’origine même de ce virus, ni sur ses différentes formes, les populations auxquelles il s’attaque, ses degrés de nocivité… Mais nous traversons également une grande incertitude sur toutes les conséquences de l’épidémie dans tous les domaines, sociaux, économiques...
 
Mais en quoi ces incertitudes forment-elles, selon vous, le lien entre ces toutes ces crises ?
E.M. : Parce que nous devons apprendre à les accepter et à vivre avec elles, alors que notre civilisation nous a inculqué le besoin de certitudes toujours plus nombreuses sur le futur, souvent illusoires, parfois frivoles, quand on nous a décrit avec précision ce qui va nous arriver en 2025 ! L’arrivée de ce virus doit nous rappeler que l’incertitude reste un élément inexpugnable de la condition humaine. Toutes les assurances sociales auxquelles vous pouvez souscrire ne seront jamais capables de vous garantir que vous ne tomberez pas malade ou que vous serez heureux en ménage ! Nous essayons de nous entourer d’un maximum de certitudes, mais vivre, c’est naviguer dans une mer d’incertitudes, à travers des îlots et des archipels de certitudes sur lesquels on se ravitaille…
 
C’est votre propre règle de vie ?
E.M. : C’est plutôt le résultat de mon expérience. J’ai assisté à tant d’événements imprévus dans ma vie – de la résistance soviétique dans les années 1930 à la chute de l’URSS, pour ne parler que de deux faits historiques improbables avant leur venue – que cela fait partie de ma façon d’être. Je ne vis pas dans l’angoisse permanente, mais je m’attends à ce que surgissent des événements plus ou moins catastrophiques. Je ne dis pas que j’avais prévu l’épidémie actuelle, mais je dis par exemple depuis plusieurs années qu’avec la dégradation de notre biosphère, nous devons nous préparer à des catastrophes. Oui, cela fait partie de ma philosophie : « Attends-toi à l’inattendu. »
 
Nous essayons de nous entourer d’un maximum de certitudes, mais vivre, c’est naviguer dans une mer d’incertitudes, à travers des îlots et des archipels de certitudes sur lesquels on se ravitaille…
En outre, je me préoccupe du sort du monde après avoir compris, en lisant Heidegger en 1960, que nous vivons dans l’ère planétaire, puis en 2000 que la globalisation est un processus pouvant provoquer autant de nuisances que de bienfaits. J’observe aussi que le déchaînement incontrôlé du développement techno-économique, animé par une soif illimitée de profit et favorisé par une politique néolibérale généralisée, est devenu nocif et provoque des crises de toutes sortes… À partir de ce moment-là, je suis intellectuellement préparé à faire face à l’inattendu, à affronter les bouleversements.
 
Pour s’en tenir à la France, comment jugez-vous la gestion de l’épidémie par les pouvoirs publics ?
E.M. : Je regrette que certains besoins aient été niés, comme celui du port du masque, uniquement pour… masquer le fait qu’il n’y en avait pas ! On a dit aussi : les tests ne servent à rien, uniquement pour camoufler le fait qu’on n’en avait pas non plus. Il serait humain de reconnaître que des erreurs ont été commises et qu’on va les corriger. La responsabilité passe par la reconnaissance de ses erreurs. Cela dit, j’ai observé que, dès son premier discours de crise, le président Macron n’a pas parlé que des entreprises, il a parlé des salariés et des travailleurs. C’est un premier changement ! Espérons qu’il finisse par se libérer du monde financier : il a même évoqué la possibilité de changer le modèle de développement…
 
Allons-nous alors vers un changement économique ?
E.M. : Notre système fondé sur la compétitivité et la rentabilité a souvent de graves conséquences sur les conditions de travail. La pratique massive du télétravail qu’entraîne le confinement peut contribuer à changer le fonctionnement des entreprises encore trop hiérarchiques ou autoritaires. La crise actuelle peut accélérer aussi le retour à la production locale et l’abandon de toute cette industrie du jetable, en redonnant du même coup du travail aux artisans et au commerce de proximité. Dans cette période où les syndicats sont très affaiblis, ce sont toutes ces actions collectives qui peuvent peser pour améliorer les conditions de travail.
 
Sommes-nous en train de vivre un changement politique, où les rapports entre l’individu et le collectif se transforment ?
E.M. : L’intérêt individuel dominait tout, et voilà que les solidarités se réveillent. Regardez le monde hospitalier : ce secteur était dans un état de dissensions et de mécontentements profonds, mais, devant l’afflux de malades, il fait preuve d’une solidarité extraordinaire. Même confinée, la population l’a bien compris en applaudissant, le soir, tous ces gens qui se dévouent et travaillent pour elle. C’est incontestablement un moment de progrès, en tout cas au niveau national.
 
Je ne dis pas que la sagesse, c’est de rester toute sa vie dans sa chambre, mais ne serait-ce que sur notre mode de consommation ou d’alimentation, ce confinement est peut-être le moment de se défaire de toute cette culture industrielle dont on connaît les vices.

Malheureusement, on ne peut pas parler d’un réveil de la solidarité humaine ou planétaire. Pourtant nous étions déjà, êtres humains de tous les pays, confrontés aux mêmes problèmes face à la dégradation de l’environnement ou au cynisme économique. Alors qu’aujourd'hui, du Nigeria à Nouvelle-Zélande, nous nous retrouvons tous confinés, nous devrions prendre conscience que nos destins sont liés, que nous le voulions ou non. Ce serait le moment de rafraîchir notre humanisme, car tant que nous ne verrons pas l’humanité comme une communauté de destin, nous ne pourrons pas pousser les gouvernements à agir dans un sens novateur.
 
Que peut nous apprendre le philosophe que vous êtes pour passer ces longues périodes de confinement ?
E.M. : C’est vrai que pour beaucoup d’entre nous qui vivons une grande partie de notre vie hors de chez nous, ce brusque confinement peut représenter une gêne terrible. Je pense que ça peut être l’occasion de réfléchir, de se demander ce qui, dans notre vie, relève du frivole ou de l’inutile. Je ne dis pas que la sagesse, c’est de rester toute sa vie dans sa chambre, mais ne serait-ce que sur notre mode de consommation ou d’alimentation, c’est peut-être le moment de se défaire de toute cette culture industrielle dont on connaît les vices, le moment de s’en désintoxiquer. C’est aussi l’occasion de prendre durablement conscience de ces vérités humaines que nous connaissons tous, mais qui sont refoulées dans notre subconscient : que l’amour, l’amitié, la communion, la solidarité sont ce qui font la qualité de la vie. ♦


Fin de la revue de presse


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Mon commentaire sur l'évolution du cours de l'action Air France-KLM

L'action Air France-KLM est à 5,276 euros en clôture jeudi 9 avril (la bourse était fermée vendredi 10 et lundi 13 avril). Elle progresse de 3,09%. Au début de l'épidémie de coronavirus, elle était à 9,93 euros.

La moyenne (le consensus) des analystes pour l'action AF-KLM est à 8,97 euros. Vous pouvez retrouver sur mon blog le détail du consensus des analystes.

Le baril de pétrole Brent (mer du nord) est à 32$, en baisse de 2$ cette semaine. Au début de l'épidémie de coronavirus, il était à 69$. Les experts estiment que, suite à l'accord entre l'Opep et la Russie, son prix devrait monter.

Ces informations indicatives ne constituent en aucune manière une incitation à vendre ou une sollicitation à acheter des actions Air France-KLM.

Vous pouvez réagir à cette revue de presse ou bien me communiquer toute information ou réflexion me permettant de mieux conduire ma fonction d'administrateur du groupe Air France-KLM.

Vous pouvez me poser, par retour, toute question relative au groupe Air France-KLM ou à l'actionnariat salarié...

A bientôt.

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