Air France-KLM

photo François Robardet, Administrateur Air France-KLM I Lettre de François Robardet

À la pointe d'une aviation européenne plus responsable, nous rapprochons les peuples pour construire le monde de demain.
(Raison d'être du groupe Air France-KLM)
 

ex-Administrateur Air France-KLM
Représentant des salariés et anciens salariés actionnaires PS et PNC

N°945, 1er janvier 2024
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La Revue de Presse du lundi 1er janvier 2024 présente :

           
Les Articles Bonus, dossiers spéciaux et Aviation Durable de l'année 2023

Chères lectrices, chers lecteurs,

Vous trouverez ici 30 (!) articles ou dossiers bonus proposés en 2023. La plupart traitent de l'Aviation Durable.

Je tiens à vous rappeler qu'il existe désormais un Observatoire de l'Aviation Durable, dont la création a été initiée par l'équipe OMNES que je coprésidais.

En voici la liste :
. Retour sur la Fondation Air France en 2022, année de son trentenaire

. Climat : le GIEC s'apprête à publier le « rapport des rapports »

. Carburants «Les e-fuels auront du sens pour l’aviation ou le maritime, pas pour la voiture»

. Comment le gouvernement a lâché sur les retraites dans le transport aérien pour assurer la paix sociale

. Pays-Bas : vers la fin du modèle de l’agrobusiness ?

. L’Europe loupe la décarbonation de l’aviation

. Carburants verts : une bombe budgétaire et fiscale à retardement

. Chaque heure, les gouvernements européens perdent 4 millions d'euros en taxes sur l'aviation

. Débat : Décarbonation, quotas… que faire de l’avion, privilège d’une minorité ?

. Dossier spécial taxes
Juin 2019, 1ère mention de l’Air Passenger Duty, un exemple pour E. Borne
Octobre 2019 vote de l'écocontribution en France, assise sur la taxe Chirac
Octobre 2019 L'Allemagne va augmenter drastiquement sa taxe sur les billets d'avion
Septembre 2020 Une écocontribution de 4 milliards d'euros : le scénario noir qui hante le transport aérien français
Novembre 2020 Les Pays-Bas vont imposer une taxe de 7,45 euros par billet d’avion
Septembre 2022 Les Pays-Bas vont multiplier par quatre leur taxe sur les voyages en avion
Avril 2023 Le Royaume-Uni divise par deux la taxe sur les vols intérieurs
Ce que les taxes nous coûtent déjà sur un billet d’avion
L'écocontribution en Europe : Synthèse Faut-il augmenter l'écocontribution aérienne ?

. Dossier spécial Le trafic aérien en 2050
Vers un trafic aérien intra-africain multiplié par 4

. Dossier spécial : L'aviation durable de demain
Rolls-Royce progresse vers la propulsion du futur
Lufthansa estime qu’il devra consommer la moitié de l’électricité allemande pour voler vert

. Savez-vous pourquoi depuis 90 ans le symbole d'Air France est un hippocampe ailé ?

. L'article de Damien Gaudin (qui collabore étroitement avec moi) : Transition écologique et transport aérien français : une équation (actuellement) difficile à résoudre

. Assurance : l'IA rejoint le climat comme risque majeur

. Spécial Aviation durable COP28 :
60 présidents de grandes entreprises françaises appellent à accélérer la transition écologique
Le secteur européen de l'aviation et l'IATA se réjouissent de l'adoption de l'objectif intermédiaire de décarbonation

. Spécial Aviation durable
Moins de traînées de condensation durables en modifiant l'altitude des avions
Carburants d'aviation durables: nouvel appel à projets doté de 200 millions d'euros

. Séisme dans le commerce mondial : la Chine interdit l'exportation de technologies liées aux métaux stratégiques

Bonne lecture
François

> Retour sur la Fondation Air France en 2022, année de son trentenaire

(source Air Journal) 28 décembre 2022 - La Fondation Air France a fêté en 2022 son trentenaire anniversaire, organisant dans le monde entier une série d’événements mettant en avant son engagement pour l’amélioration des conditions de vie d’enfants défavorisés ou en situation de handicap.

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Alors qu’elle a annoncé pour 2023 l’élargissement de ses actions vers des « projets de développement durable et de sensibilisation aux défis environnementaux », la Fondation est revenue sur les « moments de partage et de solidarité » rendus possibles cette année par la mobilisation des bénévoles-salariés de la compagnie nationale française, présents dans toutes les escales. Tout au long de l’été, des enfants suivis par des associations partenaires ont ainsi pu vivre des expériences uniques :
 
À l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle, 120 enfants de l’Association Envol (qui organise notamment des séjours ou des activités sur-mesure pour des enfants malades et leurs familles) ont pu suivre une visite des coulisses du premier aéroport français et découvrir un Airbus A350-900 d’Air France en compagnie du spationaute français Thomas Pesquet.
 
À Antananarivo (Madagascar), la Fondation Air France a célébré son anniversaire aux côtés des enfants de l’association Akamasoa lors d’un rassemblement populaire organisé par le Père Pedro. Fondée par ce dernier, cette association est soutenue par la Fondation Air France depuis de nombreuses années. Elle agit notamment pour la réinsertion sociale des plus pauvres, l’accès de tous à des conditions matérielles pérennes, et l’accès aux soins.
 
À Dakar (Sénégal), où la Fondation est historiquement très active, Anne Rigail, Directrice générale d’Air France et présidente de la Fondation, a participé à une célébration du trentenaire en présence de Mme Ndeye Saly Diop, ministre de la Femme, de la Famille et de la Protection des enfants du Sénégal, de M. Philippe Lalliot, ambassadeur de France, ainsi que d’un équipage Air France regroupant des bénévoles au sein de l’association l’Empire des enfants. Cette association œuvre à la réinsertion sociale et au soin d’enfants victimes de violences. De nombreuses associations partenaires de la Fondation étaient également au rendez-vous.
 
Cette fin d’année 2022 a par ailleurs été marquée par plusieurs moments festifs et solidaires : la Fondation a présenté les résultats d’une série de travaux menés dans l’école Commandant Sanon, à Abidjan (Côte d’Ivoire). Grâce au travail réalisé depuis 2007 avec l’association Savoir Ivoire, cet établissement peut désormais accueillir les enfants en toute sécurité et dans des conditions sanitaires appropriées. À Fort-de-France, en appui aux associations Kiwanis et Adapei, la Fondation Air France a contribué à des rencontres festives et culturelles entre un équipage d’ambassadeurs de la Fondation, accompagnés par la journaliste Eglantine Eméyé, et près de 200 enfants en situation de handicap, malades ou dans des situations précaires.
 
Enfin à Roissy, « dans une ambiance féérique », 120 enfants ont assisté à la descente d’avion du Père Noël à l’initiative du Club des Acteurs du Grand Roissy. La Fondation d’Air France a en outre offert dans la capitale des cadeaux commandés au Père Noël par des enfants défavorisés suivis par la Fondation des Apprentis d’Auteuil.
 
Depuis sa création, la Fondation Air France a soutenu plus de 1500 projets « portés par des associations dont l’expertise et l’ancrage local sont déterminants. Elle est intervenue concrètement dans tous les domaines qui peuvent faire la différence dans la vie d’enfants en difficulté : l’éducation, l’insertion sociale et professionnelle, le développement culturel ou encore les activités sportives et artistiques ». Forte des 500 ambassadeurs mobilisés dans toutes les escales d’Air France, la Fondation agit « au plus près de l’environnement quotidien des enfants, afin d’avoir un impact direct et significatif.  Elle s’appuie sur la proximité des salariés de la compagnie avec le terrain et leur connaissance des acteurs, gage d’efficacité des actions soutenues ».

Mon commentaire : La Fondation a été créée en 1992 par l’entreprise Air France. Pionnière dans le domaine des Fondations d’entreprise, elle a choisi de soutenir la cause de l’enfance, chère au cœur des salariés de la Compagnie.  

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Depuis plus de vingt-neuf ans, elle étudie, sélectionne et finance des projets en faveur des enfants malades, handicapés ou en grande difficulté, dans les pays où la Compagnie Air France est présente.  
En France, la Fondation Air France finance des projets en Île-de-France, et dans une région française choisie chaque année.

Le prochain appel à projets sera ouvert du 3 janvier au 31 mars 2022.

Il est important de rappeler que la Fondation Air France ne finance que des projets associatifs qui s’inscrivent dans la durée et qui correspondent à son domaine d’intervention : l’éducation et la formation pour les enfants et les jeunes malades, handicapés ou en grande difficulté. (0 à 18 ans).

Si vous souhaitez soumettre un projet, rendez-vous sur le site de la Fondation Air France.

> Climat : le GIEC s'apprête à publier le « rapport des rapports »

(source Les Échos) 20 mars 2023 - Six ans de travaux et plus de 10.000 pages résumées en quelques petites dizaines. C'est l'exercice fou auquel vient de se livrer le GIEC, le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, en condensant l'ensemble des rapports majeurs qu'il a établis au cours de son sixième cycle d'évaluation.
 
Cette synthèse qui doit être publiée ce lundi après-midi concentre donc les informations contenues à la fois dans son rapport principal (dont les trois volets ont été publiés entre 2021 et 2022) et dans les trois opus spéciaux produits en parallèle - sur l'impact d'un réchauffement de 1,5 °C, son effet sur les océans et la cryosphère, ainsi que sur les terres émergées.
 
Surtout, ce « rapport des rapports », tout juste adopté par les experts climat de l'ONU qui ont passé une semaine à se concerter en réunion plénière à Interlaken en Suisse, s'accompagne d'un texte particulièrement attendu : un « résumé à l'intention des décideurs » qui a été examiné puis approuvé phrase par phrase par les gouvernements, chacun possédant une voix.
 
Aussi compactés soient-ils, ces textes s'imposent comme des objets fondamentaux. Car ils vont « constituer la base scientifique des négociations internationales au sujet du climat pour plusieurs années », explique le climatologue Gerhard Krinner, l'un des trente scientifiques de l'équipe de rédaction principale. Un outil incontestable sur lequel tous les États vont s'appuyer.
 
« C'est un document assez politique, une sorte de 'roadbook' des gouvernements. Avec, ils disent : voilà ce que l'on reconnaît du changement climatique et ce que nous validons comme référence scientifique », décrypte le politologue François Gemenne, auteur principal pour le GIEC.
 
Ce rapport va donc façonner les décisions politiques lors des prochaines COP, les conférences mondiales sur le climat. À commencer par la COP28 prévue à Dubaï à la fin de l'année. Il servira en particulier de « colonne vertébrale » au tout premier bilan mondial de la mise en œuvre de l'accord de Paris. Un bilan qui doit permettre d'évaluer les progrès des États pour faire face à la crise climatique et voir comment accélérer le mouvement « pour éviter la catastrophe », souligne le World Resources Institute (WRI).
 
Le rapport du GIEC « arrive à un moment charnière », a insisté le secrétaire général de l'ONU lors de l'ouverture de la session de travail. « Nous approchons du point de non-retour, du dépassement de la limite internationalement convenue de 1,5 °C de réchauffement », a alerté une fois de plus Antonio Guterres.
 
Mais « il n'est pas trop tard, comme vous l'avez montré », a-t-il lancé, tout en exhortant les dirigeants à « comprendre les énormes conséquences d'un retard, et les énormes bénéfices à faire des choix difficiles mais essentiels ».

Ses experts le répètent inlassablement : le GIEC ne préconise rien, ce n'est pas dans sa mission. Les centaines d'auteurs des rapports passent au crible des dizaines de milliers d'études scientifiques déjà publiées dans les revues à comité de lecture. Et s'il a évoqué toutes les solutions possibles pour baisser les émissions de gaz à effet de serre et s'adapter au réchauffement, il ne recommande aucune politique aux États.
 
Sur le réchauffement climatique, le message de fond des experts ne change pas. Même si certaines choses ont évolué ces dernières années. « La science parle de l'urgence climatique, ce qu'elle faisait peu avant. Et la littérature scientifique dit désormais qu'il faut agir pendant cette décennie », relève Yamina Saheb, spécialiste des politiques énergétiques et également membre de l'équipe de rédaction principale.
 
Dans la synthèse, quelques messages pourraient être clarifiés. Lors de la dernière publication du GIEC en 2022, l'idée (fausse) qu'il restait « trois ans pour agir » avait été largement reprise par les médias et les politiques. Elle relevait en fait d'une interprétation malheureuse d'une phrase. Plusieurs auteurs avaient essayé de corriger le tir dans une tribune au « Monde » et assuré qu'« il n'existe pas de date butoir ». Car il n'est pas question pour les scientifiques « de donner l'impression que si le 1,5 °C est dépassé, c'est la fin du monde », assure Gerhard Krinner.

Mon commentaire : Précision : le texte ci-dessous provient intégralement du site franceinfo. Il s'agit du billet sciences d'Anne Le Gall, en date du 20 mars 2023. Je n'ai pas jugé bon de l'amender.

Billet sciences d'Anne Le Gall
Depuis 35 ans, la mission du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est d’éclairer les décideurs et les citoyens sur la réalité du dérèglement climatique et pour cela d'établir régulièrement des synthèses critiques des milliers des publications scientifiques existant sur le sujet. Cela veut dire que les scientifiques du GIEC qui représentent 195 pays, ont obligation de répondre à toutes les questions, les doutes, et commentaires qui leur sont envoyés par leurs confrères à travers le monde. Et que chaque phrase écrite dans les différents rapports est scrupuleusement pesée, et validée par l’ensemble de la communauté scientifique.

La synthèse publiée lundi 20 mars 2023 résume les 10.000 pages des travaux précédents. On peut ainsi retenir que notre monde est plus chaud, d'1,1°C par rapport au début de l'ère industrielle en 1850. Également à savoir : il s'agit d'un changement climatique sans précédent depuis 125.000 ans et qu’il n’y scientifiquement plus aucun doute que ce changement climatique est la conséquence des émissions de gaz à effet de serre, dues aux activités humaines.

Ce monde plus chaud entraîne déjà davantage d'incendies de forêts, de canicules, de tempêtes, de baisses des rendements agricoles et pour limiter les risques de dégâts irréversibles, il faudrait rester en dessous de 1,5°C ou 2°C de réchauffement, d’ici la fin du siècle, mais ce n’est pas la trajectoire sur laquelle nous sommes. Aujourd’hui nous allons plutôt vers un réchauffement qui pourrait être de 2,7°C d’ici 2100.

On peut être raisonnable, si...

Ce qui donne de l’espoir, c’est qu’il y a aussi un consensus scientifique sur certaines solutions pour s'en sortir. Il est encore possible d'atténuer ce changement climatique en adoptant de façon urgente des politiques adaptées. Par exemple, dans le monde agricole, en réfléchissant à place de l'élevage, qui est très émetteur de gaz à effet de serre, ou encore en restaurant des forêts, des zones humaines ou encore en adaptant les choix énergétiques, l'architecture des villes, les transports, etc.

Il y a une autre certitude scientifique : plus ces mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre se feront attendre, plus l’effort à accomplir sera grand.

> Carburants «Les e-fuels auront du sens pour l’aviation ou le maritime, pas pour la voiture»

(source Libération) 23 mars 2023 - Responsables d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre, dépendants à 90 % du pétrole, les transports doivent se décarboner. Outre l’alternative électrique, la plus mature pour les véhicules individuels, et dans une tout autre mesure l’hydrogène et les biocarburants, une autre voie émerge : celle des carburants de synthèse, ou «e-fuels». Cette technologie balbutiante consiste à produire du carburant à partir de CO2 en utilisant de l’électricité bas carbone. Aujourd’hui défendue par l’Allemagne pour prolonger l’utilisation des véhicules à moteurs thermiques, que l’UE s’est pourtant engagée à interdire à la vente à partir de 2035, elle est contestée par les ONG environnementales qui la jugent coûteuse et énergivore. Directeur de recherches au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA-Saclay), à la tête du programme d’économie circulaire du carbone, Thibault Cantat décrypte l’intérêt, les défis et les risques potentiels posés par ces électro-carburants.
 
À quels besoins répondent les carburants de synthèse ?
 
Nous sommes tous réunis autour du même objectif : la neutralité carbone en 2050. Mais en fonction de l’industrie à laquelle on appartient, il y a plusieurs façons de l’aborder. En priorité, il faut faire de la sobriété énergétique : moins on consomme d’énergie, moins on émet de CO2. Après, il y a l’efficacité énergétique, puis tout ce qui concerne l’électrification des procédés et des usages. Par exemple, pour le véhicule personnel, vous n’avez pas besoin d’une grande densité d’énergie, et une batterie fait bien l’affaire. Mais d’autres secteurs sont beaucoup plus durs à électrifier. Notamment le transport longue distance, l’aviation ou le maritime, qui doivent embarquer des carburants à très haute densité d’énergie. C’est pour ça qu’on cherche des manières de produire de façon neutre en carbone ces carburants liquides aujourd’hui issus du pétrole, comme le kérosène.
 
Comment produit-on les e-fuels ?
 
Il y a trois ingrédients principaux : du CO2 – capturé dans l’air quand la technologie sera prête, mais dans un premier temps, venant des sources où le carbone est très concentré, comme celui qui est issu des aciéries ou des cimenteries –, de l’eau, et de l’électricité bas carbone, à partir du solaire et de l’éolien, et après de nombreux débats à l’échelle européenne, du nucléaire. Il y a ensuite plusieurs façons de combiner ces ingrédients. La technique la plus mature consiste à réaliser l’électrolyse de l’eau pour produire de l’hydrogène. Ça permet de stocker les électrons sous une forme chimique, puisque l’énergie est contenue dans la molécule d’hydrogène. En combinant cet hydrogène avec le CO2, grâce à des catalyseurs, on obtient un brut de synthèse qu’il faudra ensuite raffiner, comme on le fait avec le kérosène et le diesel.
 
Contrairement aux carburants fossiles, qui émettent du CO2 qui s’accumule dans l’atmosphère, le carburant de synthèse n’est pas émetteur au moment de sa combustion. Mais bas carbone ne veut pas dire zéro carbone : il faut construire les infrastructures pour tous les procédés de conversion. Et ça, ça mobilise des matériaux, de l’énergie, qui ont une empreinte carbone. La réglementation européenne dit qu’un carburant de synthèse doit émettre 70 % de CO2 en moins qu’un carburant fossile sur la totalité de son cycle de vie.
 
Est-il pertinent de les utiliser pour décarboner les véhicules particuliers, comme veut le faire l’Allemagne ?
 
Très honnêtement, non. Le carburant de synthèse aura du sens pour l’aviation ou le maritime, pour la filière plastique aussi, mais pas pour la voiture. Le rendement pour stocker l’électricité bas carbone dans une batterie est de l’ordre de 80 %. Avec les e-fuels, on atteint 50 à 55 %. La batterie fait mieux le travail. D’autant qu’à court terme, l’électricité bas carbone va être rare : il faut l’utiliser à bon escient et éviter les conflits d’usage. Mais faute d’assez de production d’électricité bas carbone sur votre sol, comme c’est le cas de l’Allemagne qui a fait le choix de se passer du nucléaire, alors il faut importer de l’électricité renouvelable d’autres pays. Et la meilleure façon de le faire, c’est sous la forme de carburant. D’où l’intérêt, pour eux, de développer la filière e-fuel. Tous les constructeurs allemands n’ont pas forcément la même position sur le sujet. Par exemple, les voitures de collection de Porsche ne vont pas changer leur motorisation : avoir des carburants de synthèse lui permettrait de continuer ce business. Mercedes-Benz, au contraire, s’intéresse aux véhicules électriques.
 
Les e-fuels ont-ils un sens pour le consommateur ?
 
Dans les prochains mois, on va avoir une discussion sur le fait que le véhicule électrique est trop cher pour le particulier, qu’il y a un coût social trop important… Il faudra rappeler que le carburant de synthèse est très coûteux, de l’ordre de deux à trois fois plus cher qu’un carburant fossile.
 
Comment s’articulent-ils avec les biocarburants ?
 
La filière e-fuels part du principe que pour décarboner à la fois l’aviation et le maritime, on n’a pas assez de biomasse [matières organiques pouvant devenir des sources d’énergie, directement, comme le bois, ou après une méthanisation, comme le biogaz, ou des transformations chimiques, avec les biocarburants, ndlr] disponible pour produire suffisamment de biocarburants. La réglementation européenne a donné la feuille de route pour le maritime et l’aviation : en 2050, dans tous les aéroports européens, les carburants des avions devront être bas carbone à 63 %. Une partie en biocarburants, et environ la moitié en e-fuels. On doit se mettre au travail tout de suite. Pour la France, ça représente la production de 6 millions de tonnes de carburants de synthèse en 2050. C’est massif.
 
Quels problèmes posent-ils ?
 
Ils génèrent deux gros conflits d’usage. D’abord, un conflit d’usage sur l’électricité bas carbone, qu’il va falloir éviter. Ça va être un vrai défi de planification pour établir quel secteur industriel utilise combien d’électricité bas carbone. Et puis, un conflit d’usage sur la biomasse. Il est moins coûteux de faire des biocarburants que des carburants de synthèse, mais il n’y a pas assez de biomasse pour répondre aux besoins de nombreux secteurs. Il va falloir faire face à ces défis tout en quittant le système actuel. Laisser derrière nous cet âge du feu, où on brûle des ressources carbonées fossiles, pour un autre avec de l’électricité bas carbone, qu’on aura apprise à stocker.

Mon commentaire : Je vous conseille de lire (et de conserver précieusement) cet article.

Il synthétise bien la problématique du choix du futur carburant pour l'aviation.

> Comment le gouvernement a lâché sur les retraites dans le transport aérien pour assurer la paix sociale

(source Les Échos) 4 avril 2023 - Comparé à d'autres, le transport aérien aura plutôt bien traversé les turbulences de la réforme des retraites. Si quelques syndicats minoritaires affiliés aux grandes centrales, comme l'Usac-CGT chez les contrôleurs aériens, ont enchaîné les préavis, les perturbations sont restées limitées, avec guère plus de 20 % de vols annulés, essentiellement sur les aéroports d'Orly, Marseille, Toulouse et Bordeaux.
 
Les syndicats les plus puissants du secteur - le SNPL chez les pilotes et le SNCTA chez les contrôleurs aériens - n'ont pas suivi les mots d'ordre de grève des grandes centrales. Non pas parce qu'ils ne sont pas concernés par le report de la retraite à 64 ans. Mais parce que leurs représentants ont discrètement obtenu, parfois bien en amont de la réforme, des garanties du gouvernement sur le maintien de leurs différents statuts.
 
Ces négociations confidentielles entre le gouvernement et les principaux acteurs du transport aérien ne sont pas encore totalement achevées. Mais selon nos informations, le gouvernement s'est déjà engagé auprès de la fédération des compagnies aériennes (FNAM) à leur verser les aides financières nécessaires au maintien en l'état des dispositions du code des transports, qui fixe l'arrêt d'activité à 60 ans pour les pilotes et 55 ans pour les hôtesses et stewards.
 
Les pilotes et plus encore, les personnels de cabine (PNC) sont en effet dans une situation particulière. Comme tous les salariés du privé, ils sont rattachés au régime général et ne peuvent donc bénéficier d'une retraite à taux plein avant l'âge légal. Soit 62 ans aujourd'hui et 64 ans demain. Mais le code des transports prévoit une cessation d'activité à partir de 60 ans pour les pilotes et de 55 ans pour les PNC, sauf demande contraire du salarié et à condition qu'il puisse produire, tous les six mois dans le cas des pilotes, un certificat d'aptitude médicale.
 
En cas d'arrêt d'activité ou de perte de licence avant la retraite à taux plein, c'est donc à la caisse complémentaire des personnels navigants, la CRPN, financée par les navigants et leurs employeurs, d'assurer le complément de retraite jusqu'à l'âge légal. Ce qu'elle est parvenue à faire jusqu'à présent, grâce à une population de navigants suffisamment jeune et une bonne gestion. Mais plus le délai s'allonge entre l'âge de fin d'activité et l'âge de la retraite général à taux plein et plus le coût s'alourdit pour la CRPN. D'où la détermination des syndicats de navigants et de leurs employeurs, les compagnies aériennes, à obtenir de l'État, une prise en charge au moins partielle par l'État, du surcoût généré par le report de la retraite de 62 à 64 ans.
 
Seul changement notable : Air France a supprimé le dispositif interne incitant ses hôtesses et stewards à partir en retraite avant 56 ans, pour coller à la nouvelle priorité gouvernementale du maintien des « seniors » en activité. C'était l'une des raisons pour lesquelles la plupart des PNC cessent de voler à 55 ans, alors que l'âge moyen effectif de départ en retraite chez les pilotes, est de 62,5 ans.
 
Quant aux contrôleurs aériens, qui sont des fonctionnaires, l'État s'est, là encore, engagé à maintenir l'âge limite de départ en retraite à 59 ans, « compte tenu des exigences médicales et cognitives liées aux missions exercées », ainsi que le classement en « catégorie active », qui justifie un droit à la retraite anticipée au nom de la pénibilité. Seule concession : l'âge d'ouverture des droits pour ceux ayant accompli 17 années de service, passera progressivement de 52 à 54 ans.
 
L'État a également garanti le maintien des différents avantages permettant aux contrôleurs aériens de partir avec une retraite à taux plein, malgré des durées de cotisations inférieures aux 43 annuités requises, tels que la « bonification du cinquième », conçue à l'origine pour les militaires, qui permet de bénéficier d'une année de cotisation supplémentaire tous les cinq (dans la limite de 5 années gratuites). Ou encore le « complément individuel temporaire » (CIT), créé en 2015, qui accorde jusqu'à 16 trimestres gratuits aux contrôleurs aériens n'ayant pas atteint le nombre de trimestre requis à 59 ans.
 
De quoi expliquer pourquoi la réforme des retraites n'a pas suscité de mobilisation massive chez les navigants, comme chez les aiguilleurs du ciel. D'autant que ces derniers sont déjà passés au coup d'après. À savoir la négociation du prochain protocole de la DGAC, avec pour revendication centrale, une revalorisation du taux de remplacement, afin de réduire l'écart entre le dernier salaire (aux alentours de 8.000 euros, primes incluses, en fin de carrière) et la pension de retraite, de l'ordre de 40 % à 50 %.

Mon commentaire : Concernant l'âge de départ à la retraite des contrôleurs aériens, la pénibilité de leur activité a été prise en compte pour fixer les nouvelles règles.

Cette approche (prise en compte de la pénibilité pour fixer les nouvelles règles) était une des demandes des syndicats pour l'ensemble des salariés concernés par la réforme des retraites.

Selon la revue de l'APNA de cette semaine, l’âge moyen de départ effectif en retraite est de 62.4 ans pour les pilotes français et de 56 ans pour les PNC en raison, pour ces derniers, d’un système de prime de retraite à effet couperet à Air France (système qui évolue vers un lissage).

La prime de raccordement de la CRPN permet de compenser l’absence de pension du régime général jusqu’à l’âge d’ouverture des droits qui sera donc de 64 ans après la mise en œuvre de la réforme. C'est l'augmentation de la prime de raccordement (induite par la réforme) qui devrait  faire l'objet de compensation.

À noter que les statistiques de la CRPN démontrent que les personnels navigants français ont une espérance de vie à 60 ans de 4 ans supérieure à la moyenne nationale (91 ans pour les femmes et 87 ans pour les hommes).

> Pays-Bas : vers la fin du modèle de l’agrobusiness ?

(source Radio France) 10 avril 2023 - C’est le déploiement du plan de diminution de moitié d’ici 2030 des émissions d’azote qui a mis le feu aux poudres. Ce plan impose en effet une réduction drastique du cheptel néerlandais.
 
Devant la ferme de Richard Veeraaf trône un tracteur flambant neuf acheté pour Lotte sa fille de 26 ans, qui veut reprendre l’exploitation. "Mais le gouvernement ne veut plus de nous !" peste l’éleveur de vaches à viande et de cochons installé près de Breda, aux Pays-Bas. L’agriculteur redoute de devoir se séparer d’au moins 35 % de son bétail, estime-t-il. Dans certaines zones, affirme-t-il, certains perdront 94 % de leur cheptel : "Comment supporter ça avec nos revenus ? Comment va-t-on gagner nos vies ?"
 
Mais aux Pays-Bas, entre les exploitations agricoles et les quelque 160 parcs naturels classés Natura 2000 protégés par la législation européenne Nature et biodiversité, la cohabitation n’est plus possible ! L’air devient irrespirable et les sols sont gorgés d’azote, un gaz issu notamment des déjections animales.
 
À quelques dizaines de kilomètres à l’est de la ferme de Richard Verhaaf se trouve la réserve naturelle d’Oisterwijk, où l’on retrouve Lex Querelle. Lex est l’un des conservateurs de ce lieu magnifique, mélange de forêts et de marais. Mais, ici, l’azote est partout. Il tue les arbres et la biodiversité, dénonce le défenseur de la nature : "L’azote tue les champignons, autour des racines des chênes, et ils meurent lentement. Au lieu de vivre entre 400 et 600 ans, ils meurent au bout de 80 ans, à peine".
 
D’une simple pichenette, Lex arrache un gros morceau d’écorce avec son doigt. Autour de nous, les arbres sont comme "pelés" et nombre d’espèces sont menacées. 70 % des oiseaux naissent avec des os trop fragiles à cause de l’azote, affirme le conservateur, qui reconnaît pourtant que "les agriculteurs ont fait beaucoup d’efforts pour baisser la pollution grâce à la technologie". Mais cela ne suffit plus : "Regardez la nature et agissez ! Il faut prendre des décisions radicales, trop c'est trop !" s’indigne le quinquagénaire.
 
Dans le Brabant septentrional, le gouvernement local s’attaque également aux émissions d'azote dans le secteur du bâtiment. La plupart des permis de construire sont désormais suspendus. Seuls les chantiers qui n’émettent pas de gaz à effet de serre sont épargnés. Pour Erik Marteens, porte-parole pour la zone sud des Pays-Bas de la LTO, le principal syndicat agricole du pays, tout cela n’est ni acceptable, ni réaliste et c’est à l’origine de la colère très profonde des électeurs du Mouvement des agriculteurs citoyens.
 
"Quand on veut investir, bâtir, tout est bloqué ici, car l’azote est partout", se désole le syndicaliste. "C’est un problème qu’on a créé nous-mêmes et qu’on doit résoudre nous-mêmes" reconnaît-il néanmoins, même si l’équation est compliquée. Les Pays-Bas produisent beaucoup, des légumes, des fleurs, de la viande. On admet que le monde change, dit en substance Erik Martens, mais "nous sommes un petit pays, on n’a pas le même espace qu’en France et on quand même la responsabilité de nourrir les gens !"
 
Les Pays-Bas sont le premier exportateur mondial de viande pour 17,5 millions d’habitants sur une surface pas plus grande que la région Pays de la Loire.
 
Pour faire de son mouvement le premier parti au Sénat, la leader du BBB Caroline van der Plas a capitalisé sur la colère du monde rural mais aussi sur le rejet de l’élite urbaine dirigeante. Nous devons changer de méthode, admet, dépitée, Micky Adriaansens, la ministre néerlandaise de l’Économie : "Nous avons été un peu surpris et un peu effrayés aussi par l’irruption de ce nouveau parti,  admet-elle.  Le challenge va être d'atteindre ces gens et de les aider à faire la transition écologique."
 
Pour Philippe Lamberts, le président du groupe des Verts au Parlement européen, ces changements radicaux mais nécessaires doivent être accompagnés comme on l’a fait à une autre époque avec la fin du charbon : "Cela veut dire un changement de métier. Il faut voir ce que le gouvernement veut mettre en place pour adoucir la pilule. Les politiques doivent assumer leur responsabilité car on paye aujourd’hui le prix de l’inaction."
 
Et il insiste : "Ces changements vont toucher tout le monde dans son mode de vie. Mais quand c’est une question de survie, on fait ce qu’il faut ! Le modèle économique de l’agriculture néerlandaise est insoutenable ! Les Pays-Bas sont, après les États-Unis, le premier exportateur agricole au monde ! Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, ce n’est pas possible." Pour accompagner la transition, 24 milliards d’euros ont été provisionnés par le gouvernement.

Mon commentaire : Je vous dois une explication sur la présence qui pourrait paraitre saugrenue de cet article dans une revue de presse consacrée à l'aérien.

Cela fait longtemps qu'à la lecture de la presse néerlandaise, je me suis rendu compte que la pollution due à l'azote (aux Pays-Bas on parle plutôt de NOx) était pour les néerlandais plus préoccupante que la pollution due au CO2.

Ainsi, les réductions d'activité à Schiphol visent davantage à réduire les émissions de NOx que celles de CO2, alors qu'en France seule la problématique des émissions de CO2 est associée à l'aviation.

Il faut reconnaitre qu'avec plus de la moitié de sa superficie consacrée à l'agriculture, ce pays est un pionnier en matière d'horticulture sous serre. Les agriculteurs néerlandais mettent au point des méthodes innovantes qui permettent de produire davantage de nourriture avec moins de ressources. Les Pays-Bas sont devenus l'un des premiers producteurs de tomates et le premier exportateur d'oignons et de pommes de terre au monde. 

Plus surprenant, Schiphol peut compenser ses émissions d'azote en rachetant des fermes et des terres qui ne seront alors plus exploitées.

Si cet article permet d'en comprendre les raisons, il soulève néanmoins une question : comment les Pays-Bas sont-ils devenus le deuxième exportateur agricole au monde ?

J'ai eu du mal à le croire. Et pourtant, selon Business France, voici les 10 pays qui ont exporté le plus de produits alimentaires dans le monde en 2019, sur la base de données douanières :  

10. Belgique — 41,27 Mds€ : La Belgique est l'un des plus gros exportateurs de bières au monde.
9. Italie — 44,79 Mds€ : L'Italie domine sur les produits à base de tomate grâce à ses exportations de tomates en conserves.
8. Canada — 45,48 Mds€ : Le Canada est le premier pays producteur de sirop d'érable au monde. 
7. Espagne — 53,57 Mds€ : L'Espagne est le premier producteur d'huile d'olive. Elle produit plus de 50% de l'huile d'olive mondiale.
6. France — 65,03 Md€ : La France domine largement les exportations mondiales de vin avec une part de marché de 30% sur la dernière décennie.
5. Chine — 68,83 Mds€ : La Chine est l'un des principaux producteurs de thé au monde.
4. Brésil — 69,96 Mds€ : Le Brésil est le premier producteur et exportateur mondial de soja, de poulet, de sucre.
3. Allemagne — 76,39 Mds€ : L'Allemagne est le premier producteur de viande porcine d'Europe.
2. Pays-Bas — 96,12 Mds€ : Un des premiers producteurs de tomates et le premier exportateur d'oignons et de pommes de terre au monde.
1. États-Unis — 126,52 Mds€ : Les États-Unis exportent beaucoup de maïs et de soja.

L'infographie ci-dessous est basée sur des chiffres de 2020.

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> L’Europe loupe la décarbonation de l’aviation

(source Le Soir) 9 juin - Décarboner l’aviation ! L’expression était incontournable durant la grand-messe annuelle de l’aérien à Istanbul cette semaine. L’association du transport aérien international (IATA) et ses 300 compagnies aériennes (83 % du trafic mondial) se sont en effet engagées à devenir neutres en carbone d’ici 2050 (réduire les émissions de CO 2 et compenser l’indispensable), signalant souvent qu’elle attend des engagements identiques des autres moyens de transport sur route ou sur l’eau. Pourtant, parmi les nombreux défis liés à la sortie des énergies fossiles pour réduire les émissions de CO2, l’aviation plus que d’autres est souvent pointée comme une cible : dispensable pour les uns (plaidant la fin de la frénésie des citytrips, des jets privés…) plutôt que comme exemple à suivre pour les autres. Les débats sont réguliers, animés, voire passionnés. Le dossier est pleinement dans l’air du temps mais ne semble pas rassembler les énergies au niveau institutionnel européen. Plusieurs dossiers illustrent à quel point l’Europe est absente des grands enjeux et pourrait passer à côté de la décarbonation de l’aviation. Est-elle en train de louper le rendez-vous ?
 
1 Le ciel unique européen
Le plus ancien et le plus évident raté de l’Europe, c’est la mise sur pied du ciel unique européen
. Le concept, lancé en 1999, visait non seulement à ouvrir l’espace aérien européen à toutes les compagnies européennes sans passer par les traditionnelles négociations bilatérales entre pays, mais aussi une harmonisation et une simplification du contrôle aérien de ce 1,7 million de kilomètres carrés de ciel où passent plus de 5 millions de vols chaque année. Un ciel unique qui faciliterait les déplacements en intégrant la gestion des zones réservées (espaces militaires…), les contours nationaux obligatoires (le contrôle aérien reste une prérogative nationale) mais, surtout, éviterait des tours et détours qui permettraient de gagner entre 10 et 12 % d’émissions de CO2 dans l’atmosphère.
 
Tout le monde est d’accord sur le principe, mais la mise en place stagne depuis 20 ans. Notamment à cause de la résistance des grands contrôles aériens nationaux (la réforme pourrait réduire les effectifs). « L’Europe s’est engagée vers le ciel unique avant même que l’agenda environnemental et les preuves scientifiques en démontrent l’urgence », résume Rafael Schvartzman (vice-président régional de l’IATA Europe). « L’Europe se dit déterminée depuis des années à atteindre des objectifs en termes de durabilité, mais alors pourquoi est-­elle incapable de définir le meilleur moyen de l’obtenir tout en maintenant la valeur économique raisonnable des conditions de vie ? On oblige les industries à prendre des mesures, mais les États ne se les appliquent pas. Les monopoles, comme la gestion du trafic aérien, doivent supposer la supervision d’une autorité indépendante capable de faire avancer les choses. Comme elle n’existe pas, c’est une volonté politique qui d’un coup peut faire économiser plus de 10 % des émissions. En Europe plus particulièrement, il y a une perception disproportionnée de l’aviation entre ce qu’elle apporte de bien et de mal. Mais si l’Europe est si née vers la durabilité, pourquoi ne prend-­elle pas les décisions qu’il faut ? »
 
2 Le carburant durable d’aviation
Son acronyme, c’est le SAF (Sustainable Aviation Fuel). Son utilisation doit contribuer à rendre l’aviation neutre en émission de CO2 : elle représente entre 62 et 66 % de l’effort. L’Europe vient de passer de très longs mois à décider de la réglementation nécessaire à l’utilisation du SAF. Fin avril, l’Union a dressé le plan progressif d’usage de ce carburant vert : 2 % en 2025, puis 6 % en 2030, avec une augmentation jusqu’à 70 % d’ici à 2050 (et une obligation d’y inclure peu à peu des carburants de synthèse). Ce qu’elle n’a pas du tout abordé, par contre, c’est qui allait fabriquer ce carburant vert et sur la base de quoi. Bilan : on a une belle réglementation mais pas une goutte de SAF à utiliser.
 
Pendant ce temps-­là, les États-Unis subsidiaient les producteurs pour produire concrètement du SAF et ont pris une belle avance dans son utilisation. Qui reste marginale : en 2022, on aurait produit 300 millions de litres de SAF à travers le monde (240.000 tonnes), soit… 0,1 % des 254 millions de tonnes de jet fuel nécessaires au secteur. Avancées néanmoins : en 2019 (trois ans avant), la production ne représentait que 0,01 % de la consommation annuelle et, confirmation à l’IATA, il y a de nombreux projets européens dans les 130 projets actuellement en développement potentiel. Et l’objectif est d’atteindre 55 millions de tonnes produites en 2028.
 
3 La fiscalité
L’aviation est souvent considérée comme un paradis fiscal parce que son principal carburant, le kérosène, n’est pas soumis à taxation
. Un héritage de l’après-guerre (Seconde Guerre mondiale) et du réalisme économico-­stratégique visant à éviter la création de concurrence entre pays/aéroports. L’IATA insiste sur le fait que le reste de ses activités est lourdement taxé (380 milliards de dollars en 2018). Mais que devient cet argent ? En Europe, plus qu’ailleurs encore, la fiscalité liée à l’aviation sert exclusivement d’ajustement budgétaire national, pas à engendrer un cercle vertueux qui bénéficie au secteur, pour sa décarbonation par exemple. ETS exclu (lire plus loin), il n’existe pas de fiscalité dont le produit sert à améliorer l’aviation, son fonctionnement ou sa vertu écologique. La dernière taxe à l’embarquement imposée en Belgique en est le parfait exemple : elle a été introduite dans le cadre d’un mini taxshift pour combler la suppression d’une « cotisation spéciale » payée sur les salaires depuis 1994. L’Europe parle aujourd’hui (et depuis longtemps) d’imposer une taxation sur le kérosène. L’UE doit orienter les efforts fiscaux dans une perspective vertueuse au secteur aérien (utiliser une partie des perceptions pour favoriser des avantages durables, par exemple). Mais, admettons-le, c’est compliqué puisque la fiscalité reste aussi une prérogative nationale, comme le contrôle aérien.
 
4 La compensation
Il s’agit ici d’une occasion ratée. L’Europe, la première, a mis au point et posé un système de compensation des émissions aériennes.
Il s’agit de l’ETS (Emissions Trading System), un système d’achat de quotas d’émissions de gaz à effet de serre, une sorte de «bourse au carbone » qui incite les compagnies aériennes à en rejeter le moins possible puisqu’elles doivent les payer. L’exemple même de cercle vertueux qu’on souhaiterait à la fiscalité aérienne. Sauf que ce système imposé aux vols traversant l’espace aérien européen n’est finalement appliqué que pour les vols intra-européens et pénalise les compagnies européennes dans leur concurrence avec les compagnies du Moyen-Orient, de Turquie, de Chine pour les voyages extra européens… Au niveau mondial, l’Europe n’a su/voulu imposer sa logique. C’est un autre système, Corsia, qui a été mis en place (de façon volontaire jusqu’en 2025, puis imposé). Un système moins efficace mais, surtout, moins cher. Faut-­il vraiment chercher à deviner quel système a obtenu la préférence des compagnies mondiales…?
 
5 L’intermodalité
L’Europe est le pays qui dispose du plus grand nombre de possibilités pour privilégier l’intermodalité. Le réseau ferré européen, notamment à grande vitesse, est le plus dense du monde. Il existe aussi des possibilités sous ou inexploitées dans la navigation pour le transport des marchandises. Une politique intégrée pourrait/devrait favoriser l’interaction rationnelle, économique et écologique, des différents modes de transport comme nulle part ailleurs au monde. Les initiatives restent rares (le train de la gare du Midi vers Charles de Gaulle ou Schiphol). La décision récente de la France de limiter les liaisons intra françaises où une alternative TGV existe est très symbolique : ça ne concerne aujourd’hui que trois liaisons entre Nantes, Bordeaux et Lyon, uniquement avec Orly et représente un gain de 0,3 % des émissions de CO2 d’Air France. Avec l’hypocrisie que les liaisons aériennes vers ces trois villes se poursuivent depuis Charles de Gaulle. Harmoniser, organiser, améliorer, coordonner, intermodaliser… l’Europe hésite, l’Europe attend. Rappelons qu’améliorer la liaison entre aéroports et réseau ferré était prévu dans le Livre blanc européen d’un certain Jacques Delors, au milieu des années 1980

Mon commentaire : Quand je me regarde je me désole, quand je me compare je me console.

Si l'Europe pourrait faire davantage pour décarboner l'aviation, elle n'a pas à rougir de la comparaison avec les autres régions du Monde.

Elle a pris l'initiative sur le développement de l'aviation durable, que ce soit via la recherche de nouveaux carburants ou par la définition d'objectifs de décarbonation supérieurs à ceux proposés au niveau mondial.

L'Europe doit désormais se donner les moyens de fournir aux compagnies européennes suffisamment de carburants d'aviation durables, un défi de taille.

> Carburants verts : une bombe budgétaire et fiscale à retardement

(source La Tribune) 6 juillet - La solution fait consensus : les carburants verts se sont imposés comme une réponse à la nécessaire transition écologique que, comme tous les secteurs, celui du transport doit effectuer. Et, dans sa mission d'information sur « le développement d'une filière de biocarburants, carburants synthétiques durables et hydrogène vert » pour la décarbonation des transports, le sénateur et questeur Vincent Capo-Canellas (Union centriste) est clair : ces nouvelles énergies « n'apporteront pas à elles seules la totalité de la réponse, mais joueront bien un rôle central ».
 
Et les 27 propositions de son rapport vont dans le même sens : la France doit faire, sans attendre, des choix stratégiques pour « impulser » la création des filières de carburant vert, « accompagner » le développement de la production et des usages et « simplifier » le cadre réglementaire et fiscal sous peine de voir l'écart se creuser irrémédiablement avec les autres nations. Pourtant, derrière cette volonté forte d'une France à l'offensive et souveraine, une « nébuleuse » apparaît : la question des besoins de financement, décrits comme « massifs », qui s'entrecroisent avec des pertes de recettes et l'émergence de nouveaux coûts.
 
Quels apports financiers des États ?
Derrière ce terme de « nébuleuse », employé par Vincent Capo-Canellas, plusieurs phénomènes s'entremêlent. Il y a tout d'abord la question des apports financiers qui seront accordés par l'État. Pour l'instant, les politiques françaises et européennes passent essentiellement par des mandats d'incorporation (un pourcentage de carburant vert intégré dans les carburants fossiles), même si Bruxelles permet aux États des réductions fiscales sur les biocarburants routiers. Or le rapport prône la nécessité d'incitations temporaires pour soutenir l'ensemble de la chaîne, à l'instar de ce qui se fait aux États-Unis avec l'Inflation reduction act. Cela comprend la recherche & développement (R&D), les investissements nécessaires au lancement des filières (Capex), mais aussi le financement des les coûts d'exploitation (Opex) jusqu'à ce que les filières aient atteint un niveau de maturité suffisant, et enfin des aides à l'achat pour soutenir l'utilisation le temps que la massification de la production fasse baisser les prix.
 
Un dispositif d'aides incomplet
À l'image de ce qui se passe dans les carburants d'aviation durables (SAF), seule une partie de ce spectre est couverte aujourd'hui. La France a renforcé son soutien à la R&D à travers le Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC), avec 1,5 milliard d'euros accordés entre 2020 et 2022 et un nouvel apport pouvant aller jusqu'à 300 millions d'euros par an sur la période 2024-2030 annoncé par Emmanuel Macron avant le salon du Bourget. Même si cette enveloppe ne vise pas directement les SAF, elle doit contribuer à l'avion bas carbone.
 
Au-delà de la R&D, le reste des besoins de financement sont moins bien pourvus. Dans son allocution du 16 juin, le Président de la République a promis 200 millions supplémentaires (une seule fois) directement affectés à la création d'une filière française de production de SAF, mais comme le fait remarquer Vincent Capo-Canellas, cela risque de s'avérer insuffisant : « C'est toujours une chose positive que d'aider au financement d'usine, mais 200 millions d'euros ce sont quelques barils de carburant renouvelable dans un océan de kérosène. Le prix d'une usine est supérieur à 1 milliard d'euros. Si cette somme a un effet d'impulsion suffisant, c'est une bonne chose, mais il faut se dire que vraisemblablement le besoin d'investissements est quand même très important. » Sans compter les coûts d'exploitation (Opex), qui ne sont pas prises en compte.
 
Et le sénateur d'ajouter que la priorité est ensuite de faire baisser les prix. Or, comme Anne Rigail, directrice générale d'Air France, l'expliquait au Paris Air Forum : « Actuellement, la tonne de SAF en France est à 5.000 euros. Le prix moyen dans le monde s'élève à 3.500 euros. Et nous pouvons trouver la tonne à 2.000 euros aux États-Unis ». Si Vincent Capo-Canellas admet que la massification de la production va contribuer à cette baisse des prix, il estime - au contraire du gouvernement - qu'il faudra également des incitations temporaires à l'achat pour compenser le surcoût par rapport au kérosène fossile.
 
Questeur au Sénat, Vincent Capo-Canellas est bien informé des contraintes budgétaires étatiques et n'appelle pas pour autant à des dépenses à tout-va. Il insiste sur le caractère nécessairement temporaire de ces aides pour ne pas avoir « une filière sous perfusion ». Sans renier le principe de neutralité technologique, sa première proposition appelle donc à « orienter les financements publics vers le lancement des filières pour créer les conditions de marchés matures, puis évaluer et réorienter l'effort public » et donc à prioriser les secteurs les plus difficiles à décarboner et où les alternatives manquent.
 
Des besoins exponentiels en électricité
Mais le problème risque d'aller bien au-delà des soutiens directs à la production ou l'utilisation des biocarburants, notamment pour transformer le mix énergétique. Les transports sont le premier consommateur d'énergie finale en France avec 501 térawattheures (TWh) consommés en 2021, sur un total de 1.618 TWh. Cette énergie est issue à 91 % de produits pétroliers (essence, gazole, carburéacteurs), à 7 % de biocarburants incorporés et seulement à 2 % d'électricité (essentiellement destinés au ferroviaire).
 
Le fait de se passer d'énergies fossiles va impliquer de mobiliser la biomasse, ce qui va demander des infrastructures et des capacités logistiques, pour produire des biocarburants. Surtout, cela va nécessiter un recours accru à l'électricité pour alimenter directement les véhicules - en particulier avec la migration des voitures particulières vers le tout électrique - mais aussi pour la production de carburants synthétiques qui doivent succéder aux biocarburants. Tout cela va nécessiter un développement très rapide des capacités de production électrique bas carbone en France, ainsi que des raccordements aux infrastructures de distribution ou de productions de carburants synthétiques et d'hydrogène. Autant d'investissements là aussi très conséquents.
 
Le rapport sénatorial souligne, en effet, que les besoins en électricité vont connaître une croissance exponentielle en citant la dernière évaluation de RTE à l'échelle de la France : la consommation électrique devrait passer de 460 térawattheures à une fourchette comprise entre 580 et 640 térawattheures dès 2035. Et cela pourrait tenir en grande partie aux transports. Pour les seuls carburants synthétiques destinés à l'aviation, le rapport mentionne une première estimation de l'Ademe qui « montre que pour respecter les objectifs de RefuelEU Aviation, une consommation d'électricité supplémentaire serait nécessaire de 80 à 130 TWh à l'horizon 2050 pour produire le e-kérosène nécessaire ». C'est l'équivalent de la production annuelle de plus d'une dizaine de centrales nucléaires.
 
Moins d'essence, moins de recettes fiscales
À ces dépenses supplémentaires pourrait bien se combiner une perte de recettes pour l'État. La baisse de la consommation de carburants fossiles sur le secteur routier va forcément entraîner une diminution de l'assiette fiscale, et donc des recettes issues de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui rapportent environ 45 milliards d'euros à l'État chaque année. Pour l'instant, seule la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a chiffré la perte nette de recettes fiscales à 4,1 milliards d'euros entre 2019 et 2030, principalement issue de la baisse du diesel. Mais Vincent Capo-Canellas regrette que ce point ne soit jamais clairement abordé sur le fond et demande donc au gouvernement « d'évaluer dès que possible les pertes de recettes fiscales sur les énergies fossiles ».
 
Le rapport s'inquiète aussi des conséquences pour les consommateurs, du transporteur routier au voyageur aérien qui vont voir gonfler la facture en raison du prix plus élevé des carburants non fossiles. Il pointe ainsi le problème de l'acceptabilité sociale, d'autant que ce mouvement va aussi concerner d'autres secteurs comme le logement. Selon le texte, certaines filières nécessitent une transition adaptée.
 
La bombe à retardement venue de Bruxelles
Le rapport détecte aussi ce que Vincent Capo-Canellas décrit comme « une petite bombe à retardement » avec l'évolution du cadre fiscal européen sur les carburants fossiles. Il vise plus précisément la réforme du système d'échanges de quotas d'émissions (EU ETS) qui prévoit une baisse annuelle du plafond d'émissions, la disparition progressive des quotas gratuits d'ici 2026, ainsi que le renchérissement du coût des quotas. Avec cette évolution, le groupe Air France estime ainsi que le système EU ETS va lui coûter plus de 100 millions d'euros en 2023, plus de 300 millions d'euros en 2027, et 450 millions d'euros en 2030.
 
Mais cela pourrait aussi concerner un public bien plus large avec l'extension du mécanisme. En 2025, il s'appliquera aux « entités mettant à la consommation » des carburants et combustibles pour le transport routier et le logement (UE ETS2). D'abord déclaratif, le système représentera à partir de 2027 « une charge financière qui a vocation à être répercutée sur les consommateurs finaux » et donc les ménages.
 
Cette hausse du prix des carburants fossiles pourrait aussi être concomitante avec une hausse du prix des carburants... non-fossiles. La Commission européenne vient d'adopter, le 23 juin, une révision du Règlement général d'exemption par catégorie (RGEC) qui exclut les biocarburants de première génération - comme le biogazole et le bioéthanol - des énergies pouvant disposer d'une fiscalité nationale réduite. Cette « concomitance des deux évolutions réglementaires européennes peut s'avérer perturbatrice, et en tout état de cause, la facture pour le consommateur augmentera », indique le rapport.
 
Interrogée sur ces questions, la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, « s'était montrée rassurante lors de son audition », mais cela n'empêche pas Vincent Capo-Canellas de s'inquiéter d'une trop faible prise de conscience de ce qui pourrait être « un mur fiscal devant nous » et qui « peut réserver des lendemains difficiles ». Il appelle donc le gouvernement à se montrer « offensif pour défendre les biocarburants de première génération auprès de la Commission européenne ».
 
Un bilan chiffré encore à dresser
Au moment de chiffrer le bilan de cette transition énergétique dans les transports, Vincent Capo-Canellas ne veut pas s'engager sur un montant. Pour lui, sa mission pendant quatre mois et demi était de clarifier une situation bien plus complexe qu'elle ne paraissait de prime abord et de tirer des lignes pour faciliter la compréhension des enjeux et l'identification des solutions possibles. De débroussailler le terrain en somme. Surtout, il ne veut pas que ces murs d'investissements ou de dépenses pour les consommateurs découragent les plus audacieux, freinent l'élan de la décarbonation et retardent des prises de décisions qui deviennent urgentes.
 
Le sénateur reconnaît tout de même que la prochaine étape est très certainement celle du chiffrage. Et cela passe avant tout par l'État. Plusieurs recommandations vont d'ailleurs dans ce sens demandant à l'État d'établir des chiffrages précis pour les années à venir.
 
Le rapport d'information cite néanmoins plusieurs sources en la matière, tout particulièrement le rapport « Les incidences économiques de l'action pour le climat », des économistes Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz pour France Stratégie. Pour atteindre l'objectif de réduction des gaz à effet de serre de 55 % en 2030, celui-ci fait état d'un besoin d'investissements supplémentaires de 66 milliards d'euros par an tous secteurs confondus, dont une partie pour les transports.
 
L'Institut de l'économie pour le climat (I4CE), se basant sur les scénarios « Transition(s) 2050 » de l'Ademe, chiffre pour sa part un besoin moyen de 22 milliards d'euros par an (avec une fourchette comprise entre 14 et 30 milliards d'euros). Il s'agit du montant minimum à investir en plus « dans les bâtiments, les transports et la production d'énergie pour s'engager sur le chemin de la neutralité carbone, ces montants minimums ne couvrant pas les besoins dans l'agriculture, l'industrie ou encore l'adaptation au changement climatique », précise le rapport sénatorial. Les chiffres pourraient donc s'avérer encore plus importants.

Mon commentaire : Petit à petit, chaque secteur de l'Économie établit sa feuille de route de décarbonation.

Ces feuilles de route doivent permettre à la fois d'identifier les leviers de décarbonation et les freins éventuels à surmonter, mais aussi les leviers mobilisés par chacune des parties pour atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France.

À ce jour, la plupart des secteurs misent sur le remplacement de leurs sources d'énergies fossiles (gaz ou pétrole) par de l'électricité. C'est notamment le cas du secteur de l'aérien, qui aura besoin d'un énorme volume d'énergie électrique pour fabriquer les carburants d'aviation durables dont il aura besoin.

Mais c'est quasiment la première fois qu'est quantifié (dans cet article) le besoin en électricité de l'aéronautique française : 10 centrales nucléaires seraient nécessaires, à l'horizon 2050, pour produire le volume de kérosène synthétique dont auront besoin les compagnies aériennes opérant au départ de la France !

Est-ce envisageable financièrement, est-ce que ce sera accepté par l'opinion publique ?

Ou bien, comme le suggère le rapport sénatorial, faudra-t-il avoir recours à des biocarburants de première génération, un type de carburant vivement critiqué car entrant en concurrence avec l'alimentation ?



Pour rappel, Un biocarburant de première génération est un agrocarburant produit à partir de cultures destinées traditionnellement à l'alimentation. Plus spécifiquement, ce sont les organes de réserve des plantes oléifères (à huile) ou des plantes à sucre qui sont utilisés pour produire du biodiesel ou du bioéthanol, voir du biokérosène..
 .es

> Chaque heure, les gouvernements européens perdent 4 millions d'euros en taxes sur l'aviation

(source Transport & Environment, traduit avec Deepl) 12 juillet - Les gouvernements européens ont perdu 34,2 milliards d'euros de recettes l'année dernière en raison des très faibles niveaux de taxation dans le secteur de l'aviation, selon une nouvelle étude du groupe écologiste Transport & Environment. Ces 34,2 milliards d'euros permettraient de financer 1.400 km d'infrastructures ferroviaires à grande vitesse, soit l'équivalent de la distance entre Hambourg et Rome[1].
 
L'analyse porte sur les recettes qui auraient dû être tirées de la tarification du transport aérien si le secteur ne bénéficiait pas d'exemptions. Elle compare ces recettes à celles qui ont été effectivement perçues au cours d'une année. C'est ce que l'on appelle le "déficit fiscal". Le secteur ne paie pas de taxe sur le kérosène, peu ou pas de taxes sur les billets ou de TVA, et un prix du carbone sur les vols intra-européens uniquement.
 
Les gouvernements britannique et français auraient encaissé respectivement 5,5 et 4,7 milliards d'euros supplémentaires si l'aviation était taxée de manière adéquate. Les quatre pays européens où les écarts de taxation sont les plus importants sont le Royaume-Uni, la France, l'Espagne et l'Allemagne, ce qui s'explique principalement par la taille de leur secteur de l'aviation. Bien que la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni prélèvent une taxe sur les billets, leur faible niveau de taxation ne permet pas de combler l'écart.
 
Air France et Lufthansa sont les deux plus grands contributeurs à l'écart fiscal en Europe, en raison de l'importance de leur activité. L'Europe a perdu 2,4 et 2,3 milliards d'euros de recettes grâce aux activités de ces compagnies aériennes. L'étude établit une distinction entre les taxes imposées aux passagers et celles imposées aux compagnies aériennes. Les taxes sur les billets et la TVA sont imposées aux passagers, tandis que les taxes sur le carburant et la tarification du carbone sont directement imputables aux compagnies aériennes. Sur les 34,2 milliards d'euros d'écart, 20,5 milliards auraient dû être payés par les transporteurs au titre des taxes sur le carburant et de la tarification du carbone.
 
Jo Dardenne, directrice de l'aviation chez T&E, explique : "L'Europe perd de l'argent en ne taxant pas le secteur de l'aviation. Les compagnies aériennes se rapprochent de bénéfices records cette année, alors qu'elles crachent des carburants polluants dans nos cieux. Mais les gouvernements ne veulent pas toucher à leurs précieuses compagnies nationales. Comment peuvent-ils justifier aux yeux des citoyens que les conducteurs paient plus de taxes qu'Air France et Lufthansa pour leur carburant ?
 
Si aucune mesure n'est prise, l'écart fiscal augmentera de 38 % d'ici à 2025, car le secteur est appelé à se développer dans les années à venir. Eurocontrol estime que le trafic atteindra 92 % des niveaux antérieurs à la directive COVID en 2023 et qu'il se rétablira complètement en 2025. D'ici là, l'écart fiscal pourrait atteindre 47,1 milliards d'euros, selon T&E.
 
Combler cet écart et remédier à la sous-fiscalité de l'aviation devraient être une priorité absolue pour les gouvernements. L'étude recommande d'appliquer une taxe sur le kérosène, un taux de TVA de 20 % sur les billets et d'étendre le marché du carbone pour l'aviation à tous les vols en partance. Ces changements permettraient de combler le déficit budgétaire des gouvernements. En l'absence de ces mesures, T&E recommande d'appliquer une taxe sur les billets équivalente à l'écart constaté dans chaque pays.
 
L'étude montre que des taxes plus élevées auront un impact sur le prix des billets des passagers. Cela pourrait entraîner une baisse de la demande et une réduction des émissions de CO2. L'étude constate que la fin des exemptions en 2022 aurait permis d'économiser 35 Mt de CO2, avec un impact climatique total encore plus élevé si l'on tient compte des effets de l'aviation sur les émissions autres que le CO2. Alors que le secteur cherche à se décarboner, les revenus générés par la taxation devraient être en partie réinvestis dans les technologies vertes, y compris le e-kérosène.
 
Jo Dardenne conclut : "La taxation ne doit pas être perçue comme une punition, mais comme un moyen de faire payer équitablement ceux qui bénéficient le plus de la sous-réglementation de l'aviation. Les personnes les plus aisées de la société ont payé beaucoup trop peu pour leurs habitudes de vol. En outre, la taxation ne limitera pas la capacité d'investissement de l'aviation. Au contraire, la taxation de l'aviation profitera aux citoyens et au secteur à long terme, car les gouvernements interviendront pour financer la transition vers des énergies propres, y compris pour l'aviation. Il est temps de mettre fin à l'ère des vols bon marché et à l'augmentation des émissions".

 [1] Selon le rapport de la Cour des comptes européenne, la construction d'une ligne TGV dans l'UE coûte en moyenne 25 millions d'euros par kilomètre. Nous avons calculé que 1368 km de voies pourraient être construits pour un montant total de 34,2 milliards d'euros. Cela couvrirait la distance entre Hambourg et Rome (1309 km).

T&E

Mon commentaire : Plusieurs médias (Le Monde, Air Journal) ont relayé l'étude publiée par l'ONG Transport & Environment, basée à Bruxelles.

Plutôt que de vous proposer un article, j'ai préféré publier une synthèse de l'étude extraite du site de l'ONG.

J'ai eu, lors des travaux menés par mon équipe (qui ont conduit à la création de l'Observatoire de l'Aviation Durable), l'occasion d'échanger avec certains des rédacteurs du rapport. Mes interlocuteurs étaient des personnes sincères cherchant à comprendre la problématique du transport aérien.

L'intégralité de l'étude (78 pages) est disponible ici.

Selon l'ONG, les écarts de taxation (TVA, taxes sur le carburant, prix du carbone) entre les différents pays européens sont importants. On retrouve des écarts similaires entre les compagnies aériennes opérant en Europe (voir dans le tableau ci-dessus).

Pour y remédier, l'ONG propose (page 39) une taxe variable selon le trajet :
 ● 23 € pour un trajet domestique
 ● 51 € pour un voyage intra-européen
 ● 259 € pour un voyage extra-européen.

Le produit de ces taxes serait en partie destiné à financer la décarbonation du transport aérien en Europe.

Mais comme souvent, l'étude n'aborde pas les impacts économiques et sociaux. Quelques exemples :
 ● Qu'adviendra-t-il des emplois du secteur du tourisme ?
 ● Quelles seront les conséquences pour les pays de l'Afrique du Nord, si les passagers en provenance de l'Europe devaient s'acquitter d'une taxe supplémentaire de 259 € ?

Plus globalement, dans la lutte contre le dérèglement climatique, deux questions sont d'après moi au centre des débats :
 ● comment répartir les efforts demandés au sein d'un pays ?
 ● doit-on permettre aux habitants des pays ayant un niveau de vie inférieur à celui des occidentaux de gommer les différences ?

L'exemple du Maroc (lire l'article précédent) est caractéristique.


Pour l'anecdote, l'étude met en évidence le supplément d'aide accordé à Ryanair (page 46) :  pour un même vol, la compagnie irlandaise paie 2 à 3 fois moins de taxes que les compagnies traditionnelles.

> Débat : Décarbonation, quotas… que faire de l’avion, privilège d’une minorité ?

(source The Conversation) 2 août - Le président Emmanuel Macron a récemment affirmé sa volonté d’investir plusieurs milliards d’euros dans la décarbonation de l’aviation. Plusieurs voix se sont fait entendre pour souligner le caractère risqué, voire illusoire, de cette ambition et rappeler l’urgence d’une réduction du trafic aérien.

Quelques semaines auparavant, l’ingénieur Jean-Marc Jancovici proposait de limiter à quatre le nombre de vols au cours d’une vie, suscitant un débat agité sur la réduction de l’usage de l’avion par les individus.

Ces polémiques éludent toutefois une dimension centrale du problème : prendre l’avion est un privilège qui entretient notamment les rapports de domination entre les pays et en leur sein.

L’avion, un privilège du Nord global
Le discours d’Emmanuel Macron, la proposition de Jean-Marc Jancovici et la plupart des réactions qu’elles suscitent reposent sur un présupposé : l’avion est un moyen de transport incontournable, le problème est qu’il soit polluant. Or, entre 80 et 90 % des humains n’ont jamais pris l’avion de leur vie. Au cours de l’année 2018, seuls 4 % de la population mondiale a effectué un vol international.

Cette minorité à qui il arrive de voyager en avion n’est pas également répartie sur la planète : elle vit dans les pays riches. Ainsi, environ 40 % des habitants des pays les plus aisés ont pris l’avion au moins une fois dans l’année, contre moins de 1 % des habitants des pays les plus pauvres.

Si l'on rapporte les distances parcourues par les avions au départ d'un continent à sa population, cette distance par tête s'élève à 3000 km en Europe contre 100 km en Afrique. La plupart des lignes aériennes relient entre eux des pays du Nord global. Elles servent à faire circuler les individus entre ces pays, pour leurs loisirs mais aussi pour alimenter le commerce et les échanges économiques.

L’avion est donc un mode de transport qui soutient une domination économique et politique des pays du Nord et participe en leur sein à une domination de classe.

Socialisation des élites
Prenons l’exemple de la France : voyager en avion est loin d’être une pratique commune, elle demeure l’apanage des plus aisés et des plus diplômés. Ainsi, plus de la moitié des 10 % des Françaises et des Français les plus riches prend l’avion au moins une fois par an, contre 13 % des 50 % les plus pauvres. C’est le cas d’un tiers des personnes diplômées de l’enseignement supérieur, contre 10 % des moins diplômées.

Depuis longtemps, les voyages ont une place importante dans la socialisation des élites. Séjours culturels ou d’études à l’étranger, ils contribuent à les préparer à l’occupation de positions dominantes. Plus tard, ils permettent l’entretien d’un style de vie ou d’une carrière cosmopolite qui indique leur appartenance de classe.

Prendre l’avion est donc un privilège qui permet l’accumulation de ressources durables – ou capitaux – de plusieurs sortes : sociales, culturelles, économiques. De ce fait, les trajectoires sociales des membres des classes dominantes sont marquées par une quantité importante de vols en avion.

Pourtant, la forte sélectivité sociale du voyage aérien est peu visible dans le débat public. C’est que les personnes qui y interviennent, dirigeantes et dirigeants économiques ou politiques, scientifiques, journalistes, parlent depuis leur position de classe.

Pour elles, l’avion est familier, quand bien même elles considèrent aujourd’hui que cette pratique pose problème ou y ont renoncé. Cela les conduit à diffuser l’idée – fausse – qu’un quota de vols est une limitation pour tout le monde. Sans voir qu’elle l’est principalement lorsque l’avion est capital pour entretenir une position dominante ou la transmettre à ses enfants. Jean-Marc Jancovici peut ainsi généraliser :

« Quatre vols dans une vie, c’est pas zéro, on pourrait très bien instaurer un système dans lequel, quand on est jeune, on a deux des quatre vols pour aller découvrir le monde. »

Taux de recours à l’avion (%) sur une année selon le niveau de vie et le niveau de diplôme 

Taux de recours à l’avion

33 % des diplômés du supérieur ont pris l’avion au moins une fois dans l’année. Eurobaromètre 2014, Enquête nationale transports 2008, Demoli et Subtil, 2019.

La question de l’empreinte carbone
Marqueur de la domination de classe, l’avion est excessivement émetteur de gaz à effet de serre (GES), bien plus que n’importe quel autre moyen de transport.

Chaque année, en moyenne, une personne des classes supérieures émet plusieurs tonnes de GES en voyageant en avion. De ce seul fait, l’empreinte carbone de sa trajectoire sociale est sans commune mesure avec celle de la plupart des individus, qui n’ont jamais pris l’avion de leur vie ou ne l’ont pris qu’exceptionnellement.

Ainsi, les ressources durables qu’elle a accumulées grâce à ces voyages ont eu un coût écologique très élevé. Que cette personne ait ou non arrêté de prendre l’avion ces dernières années ne change qu’à la marge le coût de son privilège.

Dans le débat sur l’avenir de l’avion, il est donc avant tout question de l’empreinte écologique des positions sociales dominantes, et non de comportements individuels universels qu’il faudrait corriger.

Les quotas, une proposition ambivalente
Depuis cette perspective, comment interpréter l’idée d’un quota de quatre vols en avion dans la vie d’une personne ?

Une première interprétation est progressiste. On peut considérer qu’étendre le privilège de prendre l’avion quatre fois à l’ensemble de la société permettrait à tous les jeunes, sans distinction, d’aller « découvrir le monde ». Une interprétation toutefois écologiquement extrêmement coûteuse.

Car faire voler chaque personne quatre fois dans sa vie consommerait une part très importante du budget carbone qu’il reste à l’humanité. Pour donner un ordre de grandeur, offrir à chaque Française et Français quatre allers-retours Paris–New York dans sa vie consommerait l’équivalent de 6 % du budget carbone pourtant largement surestimé que la Stratégie nationale bas carbone alloue aux transports à la fin de la décennie 2020.

Cela pèserait d’autant plus au fil des années, le budget carbone diminuant : ces vols équivaudraient à 5 à 10 % du budget carbone total de la France en 2050.

Cette interprétation progressiste est peu concevable. Une autre, probablement plus conforme à ce qu’envisage Jean-Marc Jancovici, consisterait à ne pas encourager à voler la population qui ne vole pas, mais à limiter celle qui vole.

Cela signifie, in fine, permettre aux membres des classes supérieures des pays du Nord de bénéficier encore du privilège de prendre un petit peu l’avion. C’est donc bien sur leurs privilèges que devrait porter le débat, comme celui qui émerge autour de la décarbonation de l’aviation.

Décarboner pour une minorité ?
Si l’on veut contenir au maximum le réchauffement climatique, continuer à faire voler des avions implique leur décarbonation rapide. C’est le cas même si l’on décide de limiter les vols des classes supérieures des pays les plus riches.

Or, à court terme, il n’y a pas de solution permettant de voler autant sans émettre de GES. Emmanuel Macron a donc proposé un investissement de 8,5 milliards d’euros d’ici 2027 pour développer un « avion ultrasobre » et des carburants durables.

L’ambition séduit le monde des ingénieurs, dont les propriétés entrent en affinité à la fois avec la norme de l’avion et avec ce type de raisonnement technologique. Elle provoque également quantité d’oppositions : l’aviation ultrasobre n’existera pas dans un futur proche et elle demanderait quoiqu’il en soit une quantité très importante de surfaces de cultures ou d’électricité bas carbone.

Or, la question n’est pas seulement de savoir si c’est possible, mais si c’est désirable. Avant de décider si un secteur mérite un tel investissement, remettons au cœur du débat des éléments plus épineux que la faisabilité technologique : à qui donne-t-on la possibilité de consommer une part si importante du budget carbone restant à l’humanité ? Dans quels buts collectifs ?

Un nécessaire débat démocratique
Poser ces questions permettrait d’aborder une dimension centrale de la catastrophe écologique : elle est d’abord le fait des fractions les plus privilégiées de la planète, en termes de classes mais aussi de genre et de race.

Un tel débat aiderait à rendre plus acceptable la réduction nécessaire de l’activité d’un secteur qui, s’il est un symbole de l’industrie française, est aussi un des plus injustes et des plus carbonés de son histoire récente.

De la rendre plus acceptable, y compris aux yeux des personnes qui en pâtiront le plus : celles qui y travaillent. Cela serait un exercice démocratique intéressant, qui devrait être suivi de nombreux autres

Mon commentaire : Les auteurs de cet article sont Yoann Demoli , Maître de conférences en sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) et Julien Gros, Chargé de recherche CNRS, affilié au LISST (Université Toulouse Jean-Jaurès).

Ils abordent, entre autres, une question souvent entendue : le transport aérien est-il un moyen de transport de riches ?

À l'échelle du monde, la réponse est claire : Oui.

40 % des habitants des pays les plus aisés ont pris l’avion au moins une fois dans l’année, contre moins de 1 % des habitants des pays les plus pauvres.

Je m'interroge depuis longtemps. Est-ce que l'aviation a vocation à transporter 40 % de la population mondiale d'ici 2050 ?

Si oui, comment espérer limiter l'impact de l'aviation sur le climat ? Si non, comment expliquer à ceux qui ne voyagent pas aujourd'hui qu'ils ne voyageront pas demain ?

Cette interrogation vaut pour tous les aspects de la lutte contre le dérèglement climatique. Est-ce qu'au nom de cette lutte, les inégalités doivent subsister ou faut-il élaborer des scénarios de décarbonation qui intègrent une diminution des inégalités dans le monde ?

Selon Céline Guivarch, économiste au CIRED :

"D’une façon générale, tant au niveau des pays qu’à celui des individus, les moins riches sont les plus vulnérables au changement climatique, tandis que les plus riches sont responsables de la majorité des émissions de GES. 
(...)
Les émissions étant tellement faibles dans les pays les moins avancés, il est illusoire de penser qu’ils pourront se développer sans augmenter leurs émissions. Cela veut dire qu’une action très forte de réduction des émissions dans les pays développés est nécessaire". 

Y sommes-nous prêts ?


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Dossier spécial taxes
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Mon commentaire préliminaire : L'écocontribution sur le transport aérien est un sujet qui a été débattu et adopté dans plusieurs pays européens afin de lutter contre le changement climatique.

Elle vise à réduire les émissions de CO2 en rendant le transport aérien moins attractif financièrement, tout en générant des revenus qui peuvent être réinvestis dans des initiatives environnementales.

J'ai à plusieurs reprises abordé ce sujet dans mes lettres. En voici un résumé.

> Juin 2019, 1ère mention de l’Air Passenger Duty, un exemple pour E. Borne

(source La Tribune) 21 juin 2019 - Plutôt qu'une taxe sur le kérosène jugée trop complexe sur le plan opérationnel, La ministre des transports Élisabeth Borne évoque l'idée d'une taxe sur les passagers sur le modèle de la taxe de Solidarité ou de l'Air Passenger Duty britannique. En effet (...) la ministre des Transports se veut vigilante par rapport aux différences de taxation du secteur aérien en Europe. (...)
 
Contrairement à ce que souhaitent les compagnies aériennes, le produit de cette nouvelle taxe ne devrait pas être réinjecté dans le transport aérien mais plutôt, comme cela va être le cas pour l'excédent de la taxe de Solidarité, dans le financement des transports terrestres : « Investir dans le ferroviaire n'est-il pas une contribution à l'environnement ? », a répondu Élisabeth Borne à la question concernant l'utilisation du produit de cette nouvelle taxe. (...)

Mon commentaire : En juillet 2020, la Convention citoyenne pour le climat fera une proposition (la sd-e1) visant à adopter une écocontribution kilométrique renforcée. Elle sera elle aussi sur des bases similaires à l’Air Passenger Duty britannique.

Lire plus bas : Une écotaxe de 4 milliards d'euros : le scénario noir qui hante le transport aérien français.

> Octobre 2019, vote de l'écocontribution en France, assise sur la taxe Chirac

(source Journal de l'Aviation) 21 octobre 2019 - L'article 20 du projet de loi prévoit d'aménager le système de la taxe de solidarité (taxe Chirac) pour y intégrer cette « écocontribution ». 

Le gouvernement estime que cette taxe représentera un montant de 180 millions d'euros par an - mais la loi prévoit un plafond allant jusqu'à 230 millions d'euros. Elle sera prélevée sur les billets d'avion au départ de la France, à hauteur de 1,5 à 18 euros selon la longueur du vol et la classe de voyage. 

Son objectif n'est pas de contribuer à rendre le transport aérien plus propre, d'investir dans la recherche ou dans la création d'une filière biocarburant d'aviation viable commercialement. Non, l'intégralité de cette somme devrait être affectée au financement des transports dits propres du quotidien, notamment le train.

Mon commentaire à l'époque : Tout d'abord une précision : cette nouvelle taxe, comme la taxe de solidarité (dite taxe Chirac), ne concernera pas les passagers en correspondance.

La France n'est pas le seul pays d'Europe à appliquer une écocontribution au transport aérien :
   . Les Pays-Bas ont annoncé en fin d'année dernière [2018] que KLM devra payer 240 millions d'euros supplémentaires : 140 millions d'euros de taxe d'aviation au Trésor et 100 millions d'euros au titre de la pollution sonore.
   . En Allemagne, le gouvernement a décidé d'instaurer une nouvelle taxe au profit du développement des liaisons ferroviaires, taxe estimée à 740 millions d'euros par an (voir ci-dessous).
   . En Grande Bretagne, l'Air Passenger Duty, dont le but est de limiter l'impact climatique du transport aérien, rapportera à l'État britannique 4,3 milliards d'euros en 2019.

Si les montants diffèrent selon les pays, une constante : les compagnies aériennes déplorent que le produit de ces taxes ne soit pas affecté à des travaux de recherche de solutions alternatives au kérosène, qui permettraient de réduire les émissions de co2.

> Octobre 2019, l'Allemagne va augmenter drastiquement sa taxe sur les billets d'avion

(source Les Échos) 21 octobre 2019 - Le conseil des ministres allemand a en effet adopté ce mercredi un projet de loi prévoyant une hausse de 74 % des taxes sur les billets d'avion pour les vols domestiques et à l'intérieur de l'Europe, et de 41 % pour les long-courriers. (…)

Dans le détail, les taxes sur les vols intérieurs et européens partant d'Allemagne augmenteront de 5,53 euros, pour atteindre 13,03 euros. Celles des vols long-courriers progresseront d'environ 10 et 16 euros, selon qu'ils dépassent ou non les 6.000 kilomètres de distance. Au total, la facture pourra avoisiner les 60 euros pour les trajets les plus longs. (…)

Le gouvernement allemand escompte pour sa part un supplément de recettes fiscales de 740 millions d'euros qu'il utilisera pour financer la baisse de la TVA sur les billets de train longue distance. 

Mon commentaire : Longtemps parent pauvre de la politique de transport du pays, le rail est ainsi le grand bénéficiaire de ce virage visant à réduire drastiquement les émissions de CO2.

Le paquet climat allemand prévoit aussi d'injecter 20 milliards d'euros supplémentaires d'ici à 2030 afin de moderniser l'infrastructure ferroviaire et de renforcer les capacités de la Deutsche Bahn.

> Septembre 2020, une écocontribution de 4 milliards d'euros : le scénario noir qui hante le transport aérien français

(source La Tribune) 14 septembre 2020 - (...) Sept propositions de la convention citoyenne sur l'aviation.

La proposition qui vise à augmenter considérablement l'écotaxe sur les passagers aériens engendrerait un alourdissement de la fiscalité sur le secteur de près de 4 milliards d'euros sur la base du trafic passagers enregistré en 2019.
 
Alors que la taxe varie aujourd'hui entre 1,5 euro en classe économique pour un vol domestique et intra-européen à 18 euros en classe affaires sur un vol hors UE, la convention citoyenne recommande de la faire passer à 30 euros en classe économique et 180 euros en classe affaires sur les vols de moins de 2.000 kilomètres, et à 60 euros en classe économique et 400 euros en classe affaires sur les vols dépassant les 2.000 kilomètres. Les jets privés seraient encore plus touchés : 360 euros pour les vols inférieurs à 2.000 km et 1.200 euros pour les vols plus longs.
 
Au final, toujours sur la base du trafic 2019, les recettes de cette taxe s'élèveraient à 4,2 milliards d'euros contre 440 millions en 2020 en tenant compte de la majoration prévue en début d'année. Pour rappel, alors que l'écotaxe décidée l'an dernier s'est en fait traduite par une hausse de la taxe de Solidarité (taxe Chirac)

CCC_Ecocontribution

Mon commentaire à l'époque : L'écocontribution proposée par  convention citoyenne pour le climat est-elle une nouvelle taxe ?
Non, il s'agit d'une modification d'une taxe existante. L'écocontribution kilométrique renforcée a été calquée sur l'Air Passenger Duty qui existe au Royaume-Uni depuis plus de dix ans.

Cette taxe va-t-elle créer une distorsion de concurrence ?
Oui. Elle est très supérieure à toutes les taxes du même type auxquelles sont soumises les principales compagnies européennes, que ce soit au Royaume-Uni, en Allemagne ou aux Pays-Bas. Par ailleurs, elle viendrait s'ajouter à des taxes existant en France mais qui n'existent pas dans les autres pays d'Europe.

Cette taxe va-t-elle servir à diminuer les émissions de CO2 de l'aérien ?
Non. Telle qu'elle est présentée, elle ne va pas servir à financer la recherche d'un carburant alternatif au kérosène, alors que des projets existent : carburants de troisième génération, utilisation de l'hydrogène. Ces projets, s'ils sont menés à terme, permettraient de ramener à zéro les émissions de CO2 causées par le transport aérien d'ici une quinzaine d'années.

Les compagnies aériennes ont-elles agit, vont-elles continuer d'agir pour réduire leur empreinte CO2 ?
Oui. En 2020, Air France s'est engagée à compenser 100 % des émissions de CO2 de ses vols intérieurs, soit environ 500 vols quotidiens avant la crise et à réduire de 50 % les émissions de CO2 de son réseau domestique d'ici à 2025, à travers la modernisation de sa flotte et des fermetures de lignes.

Les professionnels français de l'aérien refusent-ils toute taxation ?
Non. Ils réclament que les efforts demandés aux compagnies aériennes pour lutter contre le réchauffement climatique soient décidés et harmonisés au niveau européen. Ils demandent que cette écocontribution serve à financer les projets permettant de réduire les émissions de CO2 des compagnies aériennes. Ils demandent également que la mise en œuvre de cette taxe n'intervienne qu'après un retour à l'équilibre financier des compagnies aériennes.

> Novembre 2020, les Pays-Bas vont imposer une taxe de 7,45 euros par billet d’avion

(source Air Journal) 16 novembre 2020 - Les passagers au départ d’un aéroport aux Pays-Bas paieront une taxe de 7,45 euros par billet d’avion à partir du 1er janvier, selon une décision du gouvernement néerlandais.
 
Il n’y aura toutefois pas de taxe sur les vols de fret car, selon le gouvernement néerlandais, les compagnies pourraient se déplacer à l’étranger, avec des conséquences désastreuses pour l’aéroport Schiphol-Amsterdam par exemple. Cette nouvelle taxe aérienne devrait rapporter environ 200 millions d’euros par an à l’État néerlandais. Elle ne s’appliquera toutefois pas aux passagers en transit. Son montant sera fixé chaque année sur la base de l’inflation.
 
L’an dernier, neuf États membres de l’Union européenne (la France, l’Allemagne, l’Italie, les trois pays du Benelux, la Suède, le Danemark et la Bulgarie) ont exhorté la Commission européenne à ouvrir le débat sur la taxation du secteur aérien, « par exemple au moyen de mesures fiscales spécifiques ou de politiques similaires ».

Mon commentaire à l'époque : Si les montants diffèrent selon les pays, il y a une constante : les compagnies aériennes déplorent que le produit de ces taxes ne soit pas affecté à des travaux de recherche de solutions alternatives au kérosène, qui permettraient de réduire les émissions de co2.

> Septembre 2022, les Pays-Bas vont multiplier par quatre leur taxe sur les voyages en avion

(source Le Figaro) 12 septembre 2022 - Dès le début de l'année prochaine, (...) selon des sources interrogées par le quotidien néerlandais De Telegraaf, le pays prévoit de faire payer davantage ceux qui partiront en avion de son territoire. Si la nouvelle n'a pas encore été annoncée officiellement, la taxe passager pourrait passer de 7,95 euros à 28,58 euros par billet à partir du 1er janvier 2023

Mon commentaire à l'époque : Petit à petit, la taxation environnementale des voyages en avion se répand en Europe.

En novembre 2020, voici ce que j'écrivais sur ce sujet.

Dès fin 2018, les Pays-Bas avaient annoncé la mise en œuvre de cette taxe [de 7,45 euros à l'époque], qui devrait impacter KLM à hauteur de 140 millions d'euros par an.

Rappelons qu'en Allemagne, le gouvernement a décidé d'augmenter sa taxe sur les billets d'avion. Elle lui rapportera 740 millions d'euros de plus par an.

En Grande Bretagne, l'Air Passenger Duty, dont le but est de limiter l'impact climatique du transport aérien, existe depuis plus de dix ans. En 2019, elle a rapporté à l'État britannique 4,3 milliards d'euros.

> Avril 2023, le Royaume-Uni divise par deux la taxe sur les vols intérieurs

(source Les Échos) 10 avril 2023 - - Ce n'était pas un poisson d'avril, mais bien une décision à contre-courant de la tendance européenne. Le 1er avril dernier, le Royaume-Uni a réduit de moitié la taxe APD (Air passenger duty) sur les vols intérieurs, afin de relancer le trafic aérien sur les liaisons domestiques. La taxe APD, qui s'applique à tous les vols au départ du Royaume-Uni depuis 1994 et dont le montant varie selon la longueur du trajet, est ainsi passée de 13 à 6,5 livres par segment (7,5 euros), soit 13 livres pour un aller-retour (15 euros), au lieu de 26 livres.

Cependant, une autre facette de la mesure gouvernementale indispose également les compagnies aériennes. La baisse de l'APD sur les vols domestiques sera en effet plus que compensée dans le budget de l'État par une hausse de cette même taxe sur les vols long-courriers de plus de 5.500 miles (8.851 km), dont le montant est passé de 82 livres par vol en classe « éco » à 91 livres (104 euros) et jusqu'à 607 livres (694 euros) en Première.

2012-2022_APD

Mon commentaire à l'époque : La recette globale au titre de l'APD (Air Passenger Duty) perçue par le gouvernement britannique était estimée pour l'année 2022-2023 à 3,5 milliards de livres (4 milliards d'euros), proche du maximum observé ces dix dernières années (voir le graphique ci-dessus).

Cette taxe, dont le but est de limiter l'impact climatique du transport aérien, est à ma connaissance sans équivalent en Europe de par son montant.

La mesure (diminuer la taxe sur les vols domestiques et l'augmenter sur les vols les plus longs) en vigueur à partir du 1er avril aura-t-elle un impact sur le comportement des voyageurs britanniques ?

Les compagnies aériennes britanniques ont apporté un début de réponse : elles augmentent leur programme été sur les vols intérieurs tout en continuant d'augmenter leur programme long-courrier.

> Ce que les taxes nous coûtent déjà sur un billet d’avion

(source Capital, extrait) 12 juillet 2019 - Pour comprendre pourquoi les taxes pèsent jusqu’à 62% dans le prix d’un billet, il suffit de se pencher sur la fiscalité du secteur aérien.
 
La taxe de l’aviation civile, spécifique à la France et encaissée par l’État, permet le bon fonctionnement de la DGAC (Direction Générale de l’Aviation Civile). Son montant se chiffre à 4,58 euros par passager pour un trajet depuis la France et à destination des 28 pays de l’Union européenne, la Suisse, l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein. Pour un trajet au-delà, comptez plutôt 8,24 euros.
 
Ensuite, les aéroports touchent une taxe à leur nom, destinée au financement de services de sûreté (contrôle des bagages, matériel de détection...), à ceux de sécurité (incendies, attentats) et aux contrôles environnementaux”. La cotisation varie selon les aéroports, expliquant ainsi en partie pourquoi le montant total des taxes diffère selon les billets d’avion.
 
Puis, effective dans seulement 9 pays, arrive le tour de la taxe de solidarité, aussi appelée taxe “Chirac”, dont la recette revient à l’UNITAID pour l’aide à la vaccination dans les pays en voie de développement. Cette fois-ci, les compagnies aériennes s’acquittent de 1,13 euros par billet classe économique (11,27 euros par billet première classe ou affaires) à destination de la France, des 28 pays de l’Union européenne, de la Suisse, l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein. Pour aller dans les autres pays, le montant de la taxe Chirac grimpe à 4,51 euros pour chaque billet économique et à 45,07 euros par trajet en première classe ou affaires.
 
Enfin, d’un montant différent selon les aéroports, les compagnies aériennes règlent la taxe sur les nuisances sonores qui, elle, varie aussi en fonction du niveau sonore de chaque avion et de ses heures de passages. Ses recettes financent l'isolation des habitations situées dans une zone définie à proximité des 11 principaux aéroports français.
 
Les autres obligations pour les compagnies aériennes correspondent plutôt à des redevances. On notera surtout celle “de passager”, réglée par les compagnies aériennes au profit des aéroports pour répondre à l’usage des infrastructures aménagées pour la réception des passagers et du public. Bien évidemment, son montant se module en fonction du nombre de passagers qu’embarque la compagnie aérienne et varie aussi selon les aéroports d’après leur flux de passagers. Comptez ainsi entre 4,30 euros et 13 euros par billet.
 
Le tout, sans oublier la TVA (10%) sur les vols internes et qui s’applique également sur la plupart des taxes citées précédemment.

Mon commentaire : L'écocontribution vient s'ajouter à différentes taxes et redevances qui sont pour l'essentiel décrites ci-dessus

> L'écocontribution en Europe : Synthèse

(sources diverses) 8 septembre 2023 - L'écocontribution sur le transport aérien est un sujet qui a été débattu et adopté dans plusieurs pays européens afin de lutter contre le changement climatique. Ces taxes visent à réduire les émissions de CO2 en rendant le transport aérien moins attractif financièrement, tout en générant des revenus qui peuvent être réinvestis dans des initiatives environnementales. Voici un comparatif des éco-taxes sur le transport aérien dans certains pays européens

France:
En 2019, la France a annoncé une écocontribution sur les billets d'avion pour tous les vols au départ de la France, sauf vers la Corse et les territoires d'outre-mer.
Cette taxe varie de 1,50 € pour un vol intérieur ou intra-européen en classe économique à 18 € pour un vol hors de l'UE en classe affaires.

Allemagne:
L'Allemagne a introduit une taxe sur les billets d'avion en 2011.
Les tarifs varient en fonction de la distance: environ 7,50 € pour les vols courts, 23,43 € pour les vols moyens et 42,18 € pour les vols long-courriers.

Royaume-Uni:
Le Royaume-Uni a une "Air Passenger Duty" (APD) qui est l'une des taxes aériennes les plus élevées d'Europe.
Elle varie en fonction de la distance et de la classe de voyage, allant de 7,50 € pour les vols courts en classe économique à plus de 600 € pour les vols long-courriers en classes supérieures.

Suède:
La Suède a introduit une taxe sur les billets d'avion en 2018.
Elle varie de 60 SEK (environ 6 €) pour les vols courts à 400 SEK (environ 40 €) pour les vols long-courriers.

Norvège:
Bien que non membre de l'UE, la Norvège a également une taxe sur les billets d'avion depuis 2016.
Elle est d'environ 80 NOK (environ 8 €) quel que soit la destination.

Pays-Bas:
Les Pays-Bas ont introduit une taxe sur les billets d'avion de 7,95 € par passager à partir de 2021, mais prévoient de la faire passer à 28,58 euros.

Mon commentaire : Les montants cités sont pour certains approximatifs ou pas définitivement adoptés.

À ma connaissance, en Europe, ces six pays sont les seuls à avoir adopté une écocontribution.

> Faut-il augmenter l'écocontribution aérienne ?

(source Les Échos / Opinion) 6 septembre - Annoncée depuis plusieurs mois, l'augmentation de l'écocontribution payée par les compagnies aériennes semble se préciser. Si le périmètre et le montant de cette taxe font encore l'objet de discussions, il est néanmoins utile de s'interroger sur le bien-fondé de son augmentation.
 
Rappelons que l'écocontribution sert à financer l'Agence de financements des infrastructures de transport de France (Afitf) dont l'objectif est d'investir dans les infrastructures ferroviaires, portuaires et routières. Le transport aérien y est déjà assujetti depuis 2020.
 
Pourquoi demander aujourd'hui au seul secteur aérien d'augmenter sa contribution ? Le transport aérien représente entre 2 et 3 % des émissions mondiales de CO2, contre 8 % par exemple pour le transport routier de marchandises, qui n'est pourtant pas concerné par une telle hausse.
 
On nous objectera que le transport aérien ne paye pas de taxes sur le kérosène, tant pour les vols internationaux que nationaux. Mais il y a une contrepartie à cela : toutes les compagnies doivent s'acquitter du tarif de sûreté et de sécurité, qui finance une mission régalienne de l'État français. Elles sont également assujetties à pas moins de cinq taxes spécifiques.
 
Ce transfert de revenus de l'aérien vers le ferroviaire est d'autant plus paradoxal que l'on augmente une taxe dans un secteur très concurrentiel pour financer un secteur ferroviaire qui reste aujourd'hui encore en quasi-monopole. Contrairement aux idées reçues, le secteur aérien est un secteur à faibles marges. Un chiffre suffit à s'en convaincre : selon l'Association du transport aérien international (IATA), à l'échelle mondiale, le profit par passager aérien prévu pour 2023 devrait être de 2,25 dollars, soit la moitié du prix d'un café [à Genève], pour reprendre l'image de l'IATA. Autant dire que toute augmentation de l'écocontribution sera répercutée intégralement sur les passagers.
 
Au-delà de son ciblage sur le seul secteur aérien, la hausse de l'écocontribution pose deux questions : celle de son assiette et celle de l'affectation des recettes. Au sujet de l'assiette, elle ne concerne actuellement que les vols au départ de la France, avec un montant différencié selon la longueur du vol et selon la classe de voyage. Un périmètre géographique aussi restreint risque de générer des distorsions de concurrence. En effet, un passager au départ de la province et faisant une correspondance à Paris sur un vol long-courrier devra payer deux fois cette écocontribution.
 
À l'inverse, s'il fait sa correspondance en Allemagne ou Royaume-Uni, il ne la payera qu'une seule fois et sur le vol le plus court. Une telle situation va porter atteinte à la compétitivité d'un pavillon français déjà mal en point. L'écocontribution devrait être pensée au moins à l'échelle européenne, voire mondiale, pour limiter les fuites de trafic et les correspondances vers des hubs plus lointains qui, en dernier ressort, augmenteront les émissions de CO2.
 
De même, si la différenciation de la taxe selon la classe de voyage est justifiée, son calibrage s'avère délicat : si la taxe est trop forte, les passagers en classe affaires préfèreront voyager en classe économique ou sur d'autres compagnies aériennes, ce qui conduira ces dernières à augmenter très fortement le prix des billets en classe économique pour compenser le manque à gagner.
 
Pour ce qui est de l'affectation des recettes, celles-ci devraient continuer à financer le réseau ferroviaire. Mais l'écocontribution ne favorisera pas pour autant la transition environnementale du transport aérien. Paradoxalement, elle pourrait même la retarder : en réduisant les marges des compagnies aériennes, elle va ralentir leurs investissements dans des flottes plus récentes ou dans le recours aux carburants durables.
 
Ces recettes devraient être fléchées vers la R&D pour l'aviation verte ou pour encourager le recours aux carburants durables. À défaut de retenir une telle option, l'Aftitf pourrait décider d'affecter les recettes au renforcement de la complémentarité modale entre le train et l'avion. Par exemple, en améliorant la desserte ferroviaire des aéroports afin de développer une véritable intermodalité. Cette affectation de l'écocontribution aurait aussi un mérite symbolique : cesser enfin d'opposer le ferroviaire et l'aérien.
 
Paul Chiambaretto est professeur à Montpellier Business School et directeur de la chaire Pégase pour l'économie et au management du transport aérien.
Emmanuel Combe est professeur des universités à Paris-I Panthéon-Sorbonne et à Skema Business School.

Mon commentaire : Il convient de le dire et le répéter.

Le transport aérien, s'il émet du CO2, rapproche les peuples pour construire le monde de demain. Pour nombre de pays, le tourisme est une ressource nécessaire voire indispensable. Elle dépend très souvent du transport aérien.

Sauf à vouloir faire disparaitre tous les avions, les recettes de l'écocontribution devraient être fléchées vers la Recherche & le Développement pour l'aviation durable et pour encourager le recours aux carburants durables.

Enfin, il est souvent question de distorsion de concurrence lorsqu'une nouvelle taxe est instaurée. 

Il faut avoir à l'esprit que les compagnies aériennes ont des taux de marge bien plus faibles que la plupart des autres entreprises. En moyenne en 2023, selon IATA, cette marge représente 2,50 euros par passager.


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Dossier Le transport aérien en 2050
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> Vers un trafic aérien intra-africain multiplié par 4

(source CercleFinance) 13 septembre - Boeing fait savoir que selon ses prévisions, le trafic intra-africain de passagers aérien devrait plus que quadrupler au cours des vingt prochaines années. L'avionneur estime que 1025 nouveaux avions seront nécessaires pour accompagner cette croissance au cours des deux prochaines décennies.
 
Toujours selon Boeing, la croissance globale du trafic aérien africain devrait atteindre 7,4%, soit la troisième plus élevée parmi les régions du monde et surpassant la croissance moyenne mondiale de 6,1 %.
 
' Les transporteurs africains sont bien placés pour soutenir la croissance du trafic intra-régional et conquérir des parts de marché développant les services passagers mais aussi le commerce au sein du continent ', a déclaré en substance Randy Heisey, directeur général du marketing commercial de Boeing pour le Moyen-Orient et l'Afrique.
(...)

Mon commentaire : L'évolution du trafic aérien en Afrique semble impressionnante, mais il convient de relativiser car le trafic actuel y est relativement bas.

Voici un tableau intitulé "Projected international air transport demand by world region, 2015-50"  extrait d'un rapport publié en 2019 par l'OCDE.

Evolution_TA_2050

Sur la période 2015-2050, il était envisagé par l'OCDE un quadruplement du trafic aérien, avec des disparités très importantes selon les zones géographiques.

En voici le détail :
  . Afrique : trafic multiplié par 9,5
  . Asie : trafic multiplié par 8
  . Chine+Inde : trafic multiplié par 6,8

  . Europe+Turquie : trafic multiplié par 1,7
  . Amérique Latine : trafic multiplié par 4,4
  . Moyen-Orient : trafic multiplié par 3,2
  . Amérique du Nord : trafic multiplié par 2
  . Pacifique : trafic multiplié par 2,3

Les parts de trafic quant à elles seront fondamentalement modifiées :
  . Afrique : passera de 3% en 2015 à 8% en 2050
  . Asie : passera de 10% en 2015 à 21% en 2050
  . Chine+Inde : passera de 14% en 2015 à 25% en 2050

  . Europe+Turquie : passera de 30% en 2015 à 14% en 2050
  . Amérique Latine : passera de 6% en 2015 à 7% en 2050
  . Moyen-Orient : passera de 6% en 2015 à 5% en 2050
  . Amérique du Nord : passera de 21% en 2015 à 11% en 2050
  . Pacifique : passera de 9% en 2015 à 6% en 2050

La question que doit examiner IATA (l’Association du transport aérien international) sans tarder est de savoir si ces évolutions sont compatibles avec la décarbonation du transport aérien.

Pour rappel, l'Europe impose qu'en 2035, les compagnies aériennes devront incorporer 20% de SAF (en français les carburants d'aviation durables).

À ce jour, l'objectif parait difficilement atteignable, surtout si les compagnies aériennes respectent leurs plans de croissance.

> Transition écologique et transport aérien français : une équation (actuellement) difficile à résoudre

Je vous invite à lire l'excellent article de Damien Gaudin (qui collabore étroitement avec moi) :
Transition écologique et transport aérien français : une équation (actuellement) difficile à résoudre


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Dossier spécial : L'aviation durable de demain
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> Rolls-Royce progresse vers la propulsion du futur

(source Journal de l'Aviation) 28 septembre - Rolls-Royce mène des recherches sur plusieurs fronts pour pouvoir proposer des systèmes à faibles émissions pour propulser les futurs aéronefs. Deux avancées viennent d'être réalisées par le motoriste, l'une dans la propulsion à l'hydrogène (en partenariat avec easyJet) et l'autre dans les systèmes hybrides électriques.
 
En ce qui concerne ces derniers, une turbine compacte spécifiquement conçue pour des vols hybrides électriques a réussi sa première combustion. Elle est vouée à être intégrée dans un système de turbogénérateur léger, à destination du marché de la mobilité urbaine voire d'applications sur des hélicoptères ou des générateurs auxiliaires de puissance.
 
Avant d'en arriver là, les équipes de Rolls-Royce vont devoir tirer les enseignements des essais pour développer leurs connaissances sur le système, analyser les données et vérifier les choix techniques, afin d'adapter le design pour les prochains essais et le faire gagner en maturité.
 
Rolls-Royce se félicite toutefois d'être parvenu à ce résultat dans un délai restreint. « La première combustion de carburant de notre toute nouvelle petite turbine à gaz constitue une avancée significative, avec des étapes réussies tout au long de l'essai, depuis l'allumage jusqu'à l'arrêt du système. Cette réalisation importante fait suite au développement rapide de la nouvelle turbine, qui est passée du gel du design à l'essai en moins de deux ans », souligne Matheu Parr, directeur Clients de la division Electrical chez Rolls-Royce.
 
L'hybridation des systèmes de propulsion est une étape clef pour la décarbonation de l'aviation, mais elle ne fait pas perdre de vue un autre défi à relever : celui de développer un moteur fonctionnant à l'hydrogène. C'est l'objet d'un autre volet de recherches, menées en partenariat avec easyJet et le soutien de l'université de Loughborough au Royaume-Uni et du centre aérospatial allemand DLR.
 
Là, des essais ont été réussis sur une chambre de combustion annulaire complète d'un moteur Pearl 700 avec 100 % d'hydrogène, montrant que le carburant peut être brûlé dans des conditions correspondant à la poussée maximale au décollage d'un appareil. Après la mise en route d'un moteur AE2100 avec de l'hydrogène vert l'année dernière, Rolls-Royce estime « que l'élément combustion du programme hydrogène est désormais bien compris ». Mais le plus gros reste à venir avec la conception des systèmes d'alimentation du moteur en carburant et leur intégration.
 
En attendant, pour ces essais sur la chambre de combustion du Pearl, le motoriste a conçu de nouvelles buses de pulvérisation de carburant destinées à contrôler le processus de combustion de l'hydrogène - qui brûle plus vite et à plus forte température que le kérosène. En mélangeant progressivement l'air à l'hydrogène, elles permettent de gérer la réactivité du carburant.
(...)

Mon commentaire : Le diable est dans le détail.

Cette formule s'applique bien aux deux annonces faites ici.

Les vols hybrides électriques ne concernent que de très petits trajets ; une solution qu'ADP teste également (lire la lettre n°930), pour des trajets sanitaires et d'urgence.

Les experts espèrent la mise en service d'un avion avec cette motorisation à partir de 2040, pour des liaisons inférieures à 500 km ; des liaisons non exploitées aujourd'hui par la plupart des compagnies aériennes.

En clair, cette solution ne facilitera en rien la décarbonation de l'aérien d'ci 2050.


Quant à la seconde annonce, l'hydrogène, il ne s'agit ici que de la mise au point des moteurs. Il n'est pas question des conséquences sur la structure des avions.

Pour être transportée sous forme liquide (un impératif, l'hydrogène gazeux prenant trop de place) l’hydrogène doit être refroidi à -253°C et maintenu à cette température dans une citerne cryogénique. Cette solution équipe les fusées Ariane (passées les deux premières minutes nécessaires pour quitter l’atmosphère, durant lesquelles le carburant est du propergol solide).

Mais il s'agit d'un défi colossal pour les constructeurs d'avions que ce soit :
  . en termes de sécurité (la moindre fuite est fatale),
  . de durée (le besoin pour une fusée se compte en minutes, bien loin de la dizaine d'heures pour un avion).

Quant au stockage, les réservoirs d'hydrogène liquide doivent être cylindriques, ce qui implique de changer fondamentalement la structure des avions. Le réservoir doit alors ou bien résister à de hautes pressions, ou disposer de systèmes secondaires maintenant l’hydrogène à basse température, et à une pression au moins légèrement supérieure à la pression atmosphérique. En outre, la liquéfaction de l’hydrogène et son maintien en température ont un coût énergétique élevé

Voici à quoi pourrait ressembler un avion à hydrogène :

Airbus-avion-delta

> Lufthansa estime qu’il devra consommer la moitié de l’électricité allemande pour voler vert

((source Novethic) 28 septembre - La grande désillusion (ou pas). Lors d’une conférence nationale sur l’aviation à Hambourg, lundi 25 septembre, Carsten Spohr, le patron de Lufthansa, premier transporteur européen, a estimé que la compagnie "aurait besoin d'environ la moitié de l'électricité allemande pour convertir en carburant synthétique toute sa flotte actuelle". De quoi mettre à mal le mythe de l’avion vert, sur lequel se repose le secteur pour atteindre la neutralité carbone.
 
Les carburants de synthèse, également appelés e-fuels, combinent de l'hydrogène et du CO2 capté dans l'air ou dans les fumées industrielles. Pour être considéré comme verts, ils doivent être produits à partir de sources décarbonées comme les énergies renouvelables. Ces carburants de synthèse font partie de la famille des carburants aériens durables (ou "sustainable aviation fuels", SAF en anglais), aux côtés des biocarburants, les seuls utilisés aujourd’hui, et de l’hydrogène vert encore au stade de prototype.
 
Et cette quantité astronomique d’électrique, l'agence fédérale des réseaux et le ministre fédéral de Économie Robert Habeck (Verts) "ne me la donneront pas", reconnaît, lucide, Carsten Spohr, qui ne baisse pas pour autant les bras. Selon lui, la solution "réaliste" passe par l'achat de ce combustible synthétique "à l'étranger, là où l'énergie éolienne ou solaire est disponible en quantités pratiquement illimitées", a-t-il ajouté, sans citer de pays précis. Ce chemin sera "long, mais c'est le bon", s'est dit convaincu Carsten Spohr.
 
"Le constat qu'il dresse est correct, la conclusion qu'il en tire ne l'est pas", commente sur Linkedin l’ingénieur Maxence Cordiez. Selon ce spécialiste de l’énergie, "la priorité est de décarboner l'électricité pour ses usages actuels, avant de la convertir en carburants de synthèse". Il souligne également que la plupart des pays qui se positionnent sur la production d'hydrogène pour l'exportation sont "des pays dont le bouquet électrique a une intensité carbone très élevée et/ou où l'ensemble de la population n'a pas accès à l'électricité et/ou où il y a des contraintes d'accès à l'eau (nécessaire pour produire de l'hydrogène".
 
Il semble de fait assez peu réaliste que ces pays parviennent à répondre à cette triple exigence : décarboner leur électricité, offrir l'accès à l'électricité pour tous, et produire assez d'électricité pour produire des carburants de synthèse destinés à l'exportation, dans un délai relativement court. "Finalement, la conclusion - difficilement acceptable - que le PDG de la Lufthansa aurait dû tirer est que la décarbonation du trafic aérien passera aussi et surtout par une forte réduction d'usage", conclut Maxence Cordiez.
 
Mais cette question de la réduction du trafic reste taboue. Pour arriver à zéro émission nette d’ici 2050, le principal levier envisagé est la compensation, au travers du mécanisme Corsia. Ce système, adopté en 2016, doit permettre au secteur de compenser la hausse de ses émissions afin de les maintenir à leur niveau moyen de 2019-2020, sur une base volontaire à partir de 2024 puis obligatoire à partir de 2027. Seulement, le système a une nouvelle fois été revu à la baisse lors de la réunion de l’OACI. Si bien que selon les calculs de Transport & Environment (T&E), seulement 22% des émissions internationales totales seraient compensées d'ici 2030.
 
L’autre levier repose sur les carburants aériens durables, dont on voit les limites (auxquelles il faut ajouter une envolée des coûts). L’Union européenne va ainsi imposer à partir de 2025 d'incorporer en moyenne 2% de SAF dans le kérosène des vols en Europe et au départ de l'Europe. En 2030, ce pourcentage passera à 6 %, puis progressivement à 20 % en 2035, 34 % en 2040, 42 % en 2045, pour monter à 70 % d'ici à 2050, date à laquelle le transport aérien s'est engagé à attendre la neutralité carbone.
 
Ce volume de SAF sera essentiellement composé de biocarburants. Mais à partir de 2030, il devra aussi comprendre une partie de carburants synthétiques. Elle sera de 1,2% en 2030, puis 5% en 2035, et 35% en 2050. Si cette trajectoire est respectée, ces carburants synthétiques représenteront alors la moitié des carburants durables en Europe. Reste à produire assez d’électricité décarbonée pour que nos avions volent vraiment vert…

Mon commentaire : J'ai beaucoup à redire concernant les propos du PDG de Lufthansa.

Le continent africain est aujourd’hui le continent où l’on consomme le moins d’électricité : en 2019, la consommation moyenne d'électricité par habitant était de 560 kWh en Afrique, soit seulement 17,2 % de la moyenne mondiale de 3 265 kWh (7 043 kWh en France, 12 744 kWh aux États-Unis, 5 119 kWh en Chine). La quantité d’électricité consommée en 2019 sur le continent, 732 TWh, est à peine supérieure à celle de l’Allemagne : 644 TWh.  

Comment le PDG de Lufthansa peut-il prétendre produire du e-fuel dans des pays (en Afrique a priori) qui sont en manque d'eau et d'électricité ?

Comment peut-il demander à ces pays de produire pour Lufthansa une quantité d'électricité verte qui permettrait de subvenir aux besoins de plus de la moitié de la population africaine ?

Derrière ce type de discours transparait l'idée que la science permettra de résoudre tous les problèmes. On appelle cela le scientisme.

(Le terme scientisme est utilisé pour désigner l'approche selon laquelle les problèmes concernant l'humanité et le monde pourraient être réglés au mieux, si ce n'est parfaitement, suivant le paradigme de la méthode scientifique.)

On peut néanmoins envisager que les problèmes de décarbonation de l'aérien trouveront une réponse dans la science. Mais pas dans le délai imparti, à savoir d'ici 2050.

D'ici 2050, il n'y aura pas d'avion électrique long-courrier, ni même d'avion électrique court-courrier.

D'ici 2050, il n'y aura pas d'avion à hydrogène : les spécialistes ne l’envisagent que pour la seconde moitié du siècle.

D'ici 2050, il n'y aura pas d'e-fuel (des carburants fabriqués à partir de CO2 capté dans l'atmosphère, d'hydrogène extrait de l'eau, d'électricité verte). La quantité d'énergie verte nécessaire pour les produire ne sera pas disponible (pour Air France-KLM il serait question de six réacteurs nucléaires). Cette option évoquée par le PDG de Lufthansa est une vue de l’esprit, du greenwashing sans fondement.

Alors, quelles sont les solutions qui s'offrent aux compagnies aériennes ?

Elles sont multiples. Elles passent par le renouvellement des flottes, l'amélioration des conditions de vol (trajectoires plus directes, approches en descente continue, ..., ces options étant pour la plupart décrites dans ma lettre n°835). Les compagnies aériennes devront également mettre en place des solutions de captation de CO2.

Et si cela ne suffit pas, elles devront faire preuve de sobriété, un mot encore tabou. Surtout pour les compagnies aériennes asiatiques et africaines, qui ont prévues de décuplé leur activité d'ici 2050 (lire ma lettre n°930)

Rappel : Il convient de ne pas oublier les termes de l’Accord de Paris : la neutralité carbone est entendue comme l’atteinte de l’équilibre entre les émissions de gaz à effet de serre et le puits de carbone, c’est-à-dire les absorptions par les écosystèmes tels que les forêts, les prairies, les sols agricoles et les zones humides, et par certains procédés industriels, tels que la capture et le stockage du carbone.

> Savez-vous pourquoi depuis 90 ans le symbole d'Air France est un hippocampe ailé ?

Loin d'être une simple coquetterie graphique, l'hippocampe ailé d'Air France est un testament de l'identité de la compagnie qui célèbre son anniversaire ce 7 octobre 2023. Explications.

Hippocampe

(source Le Figaro) 6 octobre - Si vous avez déjà emprunté un vol Air France, il est fort probable que le symbole emblématique de la compagnie ait attiré votre regard : un élégant hippocampe ailé. Mais combien d'entre nous se sont réellement interrogés sur l'origine de ce choix symbolique ? D'où vient cette «crevette», comme elle est surnommée par les salariés Air France, et que signifie-t-elle pour une compagnie qui domine le ciel plutôt que la mer ?

Les origines
Tout remonte à 1933. C'est le 30 août que la Société Centrale pour l'Exploitation de Lignes Aériennes prend officiellement le nom d'Air France. Née d'une fusion, réalisée au printemps de la même année, entre les cinq principaux transporteurs aériens tricolores de l'époque - parmi lesquels Air Orient, elle ne tardera pas à regrouper la totalité des compagnies aériennes nationales. C’est donc le 7 octobre 1933 qu’est célébré sur l'aérodrome du Bourget le «baptême» d'Air France, en présence de Pierre Cot, ministre de l'Air. Louis Allègre, le président de la nouvelle compagnie aérienne, lors d'une conférence de presse, avoue qu'il n'a pas encore de nom. «Pourquoi pas Air France ?» propose Georges Raffalovich, journaliste au quotidien Le Journal. Approuvé. Il fallait maintenant un logo pour incarner son identité. Costa de Beauregard, ancien d'Air Orient, propose comme emblème l'hippocampe, le cheval marin évoquant l'hydravion, très utilisé à l'époque. Adopté. À une époque où le tourisme mondial n'en était qu'à ses balbutiements, cet hippocampe ailé allait inviter au rêve, à l'exploration et à la découverte de contrées lointaines.

L'hippocampe ailé : entre terre, mer et ciel
Si, à première vue, choisir un hippocampe pour une compagnie aérienne peut sembler incongru, ce choix se révèle pourtant riche de sens lorsqu'on le replace dans son contexte. Déclinaison d'un protomé, il est formé du buste de Pégase, cheval ailé de la mythologie grecque (symbolisant la puissance) et de la queue du dragon d'Annam (rappelant l'hydravion), symbole de la famille impériale du Vietnam. Le tout évoque ainsi un hippocampe surmonté d'ailes. Alors que le débat fait rage entre l'avion et l'hydravion, le merveilleux animal fait consensus, aussi à l'aise dans le ciel que sur les flots. La légende raconte que Maurice Noguès, l'un des aviateurs de l'aventure inaugurale d'Air France, aurait aperçu ce poisson énigmatique en faisant naufrage dans la baie de Naples en 1928.
Dans un article paru en 1952 dans la revue Publimondial, Jacques Albert Deport, alors Chef de publicité de la compagnie Air Orient à partir de 1930, puis responsable des «services de propagande» d’Air France, évoque la création de cet emblème et la difficulté dans la construction du graphisme. «Comment, sans nuire à son caractère de solidité, amalgamer ces trois éléments disparates ? C'est Marrast (l’architecte de la compagnie, NDLR) qui m'en souffla la solution en me conseillant d'utiliser la coupure, telle qu'elle existe dans le cavalier du jeu d'échecs.» En 2000, le Musée Air France récupéra un dessin de juin 1933, validé par Marrast, pour la réalisation du logo avec les lettes À et F qui disparurent en décembre 1934. Ce dessin explique qu'il y a en fait deux logos, un pour chaque côté de l'appareil, afin que la tête de cheval soit toujours dirigée vers l'avant.

Un symbole largement décliné
Au fil des années, Air France a bien évidemment modernisé son image, mais l'hippocampe ailé reste un témoin de l'attachement de la compagnie à ses racines et à son histoire. Billets d'avion, uniforme, articles de voyage, publicités, magazines de bord et même les bâtiments infrastructures : au fil du siècle, Air France a décliné ce symbole emblématique sur de nombreux supports. Dans sa version stylisée la plus récente dite « au fil », il est le symbole de l'univers La Première, l'expérience de voyage la plus exclusive de la compagnie. Une manière également de montrer que, même à l'ère du tourisme de masse, elle reste fidèle à ses valeurs d'exploration, d'aventure et de découverte.

crevette pins_AF Crevette_AF

Mon commentaire : La "crevette" est désormais présente partout au sein d'Air France, que ce soit sur les winglets (les ailettes situées au bout des ailes), sur les uniformes des personnels ... ou sur mon bureau.

> Assurance : l'IA rejoint le climat comme risque majeur

(source Les Échos) 30 octobre - À un mois de la COP28, les risques liés au changement climatique inquiètent toujours. Et ils arrivent pour la première fois en tête des risques émergents dans toutes les régions du monde, selon la dixième édition du Futures Risks Report publié par l'assureur AXA ce lundi. Mené auprès de 3.300 experts de 50 pays et de 19.000 personnes du grand public dans 15 pays en juin dernier, le Futures Risks Report mesure et classe chaque année leur perception de l'évolution et de l'émergence des risques. En étudiant les nouveaux risques « nous identifions de nouvelles solutions », explique le groupe.
 
Parmi les autres principales sources d'inquiétude, on trouve toujours également les risques liés à la cybersécurité, les pandémies et les maladies infectieuses, l'instabilité géopolitique et les tensions sociales . Ce qui fait dire à AXA que l'étude montre que les crises ne se succèdent plus, elles se superposent.
 
Pourtant, cette année l'intelligence artificielle (IA) et la Big Data font une entrée fracassante dans le classement des risques émergents, passant de la 14e place en 2022 à la 4e place cette année du côté des experts. Et si ces technologies sont moins citées par le grand public, au niveau mondial, ils arrivent à la sixième place en Asie et en septième position en Amérique.
 
 « Les risques liés à la technologie en général sont perçus comme ceux qui émergent le plus rapidement », a expliqué Etienne Mercier, directeur du pôle Opinion chez Ipsos, avec qui AXA réalise l'étude. Il faut dire que l'arrivée de ChatGPT et de l'IA générative a fait grand bruit et provoqué une levée de boucliers dans de nombreux secteurs, en raison de craintes pour l'emploi.
 
En plus de la Big Data, experts et populations s'inquiètent des technologies disruptives en général, des risques éthiques et économiques liés à leur utilisation et de leurs conséquences sur l'avenir du travail. L'avenir de l'emploi est notamment une préoccupation majeure en Asie, et particulièrement en Chine, une région qui adopte souvent rapidement les technologies de pointe. En Europe, le grand public n'a toutefois pas vraiment encore conscience de ces risques.
 
La majorité des experts placent même cette technologie comme un risque en raison de la « menace existentielle que l'avancée de l'IA pourrait représenter pour l'humanité », explique le rapport. La majorité des experts (64 %) et de la population générale (70 %) estime même qu'il serait nécessaire d'interrompre la recherche sur l'IA.
 
Globalement, l'opinion que les avancées technologiques créent plus de risques qu'elles n'en résolvent continue de progresser. Elle est désormais partagée par la moitié de la population (52 % en France, 49 % aux États-Unis). Le sentiment de vulnérabilité face au risque posé par l'IA progresse également, car globalement les pouvoirs publics et le secteur privé sont considérés comme moins bien préparés pour y faire face, contrairement à d'autres risques.
 
« C'est un sujet qui est au cœur des réflexions européennes avec la nécessité de trouver un bon équilibre, a expliqué Frédéric de Courtois, directeur général adjoint d'AXA. Nous sommes très favorables à une réglementation responsable et équilibrée. » Il a notamment mis en garde contre le fait d'adopter une réglementation trop dure sur l'IA, « car nous sommes en concurrence avec les États-Unis et la Chine et nos entreprises ont besoin d'avoir des données pour avancer sur ces sujets. »
 
Sur les catastrophes naturelles qui se multiplient, Frédéric de Courtois a expliqué qu'AXA pensait que tous les risques de ce type étaient assurables à condition qu'ils soient évalués au juste prix, ce qui n'était pas encore tout à fait le cas. Ces phénomènes récents par leur violence sont encore mal documentés.
 
Le directeur général adjoint du deuxième assureur mondial a également mis en avant l'efficacité du partenariat public/privé qui existe en France et salué le rapport Langreney sur l'évolution du système assurantiel face au dérèglement climatique, « qui sera extrêmement utile ».

Mon commentaire : Je travaille avec mon équipe pour évaluer comment l'utilisation de l'intelligence artificielle et du big data impactera les emplois du transport aérien.

D'ores et déjà, nous avons identifié des apports positifs, comme l'amélioration des informations transmises en temps réel aux pilotes, aux personnels des centres d'appel, aux commerciaux, les gains de temps pour les développements informatiques.

De nouveaux profils de compétences seront nécessaires pour exploiter au mieux les ressources de l'intelligence artificielle.

À l'inverse, il est vraisemblable que des postes, voire des emplois pourraient disparaitre.

Il appartiendra aux responsables des ressources humaines, en collaboration avec les instances représentatives du personnel, de quantifier ces évolutions.

Ils disposent pour cela d'un outil, la Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels, conçu pour permettre une gestion dynamique et proactive des compétences et des métiers.


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Spécial Aviation durable
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> COP28 : 60 présidents de grandes entreprises françaises appellent à accélérer la transition écologique

(source tribune collective) 26 novembre - La COP28 va s'ouvrir, les travaux préparatoires confirment la diversité des trajectoires nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de transition écologique. ­L'Europe et la France ont pris des engagements ambitieux, parmi les plus ambitieux de la planète. Ils consistent, en ligne avec l'accord de Paris et celui de Kunming-Montréal, à atteindre la neutralité carbone et à restaurer la biodiversité en 2050 sans peser davantage sur les ressources du reste du monde, à faire notre part pour préserver les conditions d'habitabilité de notre planète.
 
Les scientifiques, ainsi que le Haut Conseil pour le climat, indiquent que nous ne sommes pas sur une trajectoire d'émissions compatible avec ces engagements. Il est indispensable d'accélérer encore les investissements de transition, déjà considérables, faits par les pouvoirs publics, les Français et nos entreprises pour réduire nos émissions, changer d'énergie et investir rapidement dans un modèle de production et consommation décarboné, nous adapter, former les acteurs.
 
Ce sera le sujet de l'étude ÉTÉ 2030 de l'association Entreprises pour l'Environnement qui sera publiée en décembre avec des priorités pour 2030. Nous devons aussi intégrer les efforts d'adaptation au changement climatique et de régénération de la nature à celui de la réduction de nos émissions.

Nous avons déjà prouvé ensemble l'an dernier qu'une sobriété est possible. Le plan collectif de l'hiver 2022 a permis d'économiser 12 % de gaz et d'électricité combinés. Nous devons maintenant investir davantage pour renforcer et inscrire ces économies d'énergie dans la durée.
 
Nous pensons possible de construire ensemble une nouvelle prospérité compatible avec les limites de notre planète ; nous proposons de la fonder sur des innovations et des investissements qui développent la circularité, cette sobriété structurelle, et une nouvelle relation au vivant. Nous croyons qu'elle sera créatrice d'emplois, riche de sens, source de santé et de mieux-vivre.
 
C'est pourquoi nous lançons cet appel commun. Cette transformation se fera avec tous : acteurs économiques (nous avons des solutions et une capacité d'innovation, d'entraînement, de financement et d'actions collectives) ; pouvoirs publics, car la transition exige un accompagnement par des cadres et dispositifs clairs et une équité de l'effort ; citoyens et habitants, consommateurs, élus, dirigeants, collaborateurs ou actionnaires... Nous pouvons tous choisir de jouer un rôle actif et d'adopter les nouveaux modes de vie proposés.

Nous appelons à avancer tous concrètement sur deux priorités. La première est de tous réallouer nos dépenses et notre temps, réinventer et réinvestir dans nos outils de production, de distribution et de services, nos logements, nos transports, nos modes de consommation pour décarboner, limiter les déchets, recycler, régénérer la nature. Une économie de long terme en énergie, en matériaux, en sols est indispensable pour réduire les pressions sur la planète et nos vulnérabilités. Nous croyons possible de combiner accroissement du bien-être et allègement de notre empreinte matérielle. Nous devrions mieux vivre, dans une nouvelle prospérité économique, si nous décidons ensemble de consommer autrement : une alimentation et un environnement meilleurs pour notre santé, des logements confortables et des services accessibles.
 
L'autre priorité est de réinventer ensemble notre modèle de société : nos entreprises s'activent et investissent pour renforcer nos impacts positifs et limiter nos impacts négatifs. Au-delà, des règles de vie collective sont nécessaires pour gérer durablement et équitablement la rareté des ressources, accompagner les plus vulnérables dans cette transformation qui les protègera et renforcer notre résilience pour anticiper les crises de toute nature. Pour que les Français adhèrent à cette dynamique de transformation, il est aussi nécessaire qu'elle soit perçue comme conduisant à plus d'équité.
 
L'adhésion de la majorité à cette transformation est une condition de son succès. Nous y adhérons nous-mêmes. Nous sommes convaincus qu'elle constitue une voie réaliste de prospérité, de santé et de mieux-vivre. L'enjeu en vaut la peine : il y a urgence, et il y a besoin de tous et de toutes les solutions pour relever un défi inédit dans l'histoire de l'humanité. Nous sommes mobilisés et à votre écoute, montrons ensemble que c'est possible. 

Mon commentaire : "L'autre priorité est de réinventer ensemble notre modèle de société" (sic).

Un seul mot me vient à l'esprit : CHICHE !

Mais ce n'est pas à l'ordre du jour de la COP28 qui démarre.

La COP28 est cette année organisée à Dubaï. Elle est présidée par Sultan al-Jaber, le patron de la compagnie nationale pétrolière émiratie, ce qui a suscité d'importantes réserves quant à son issue.

=== source FranceInfo
Fondateur de Masdar, géant émirati des énergies renouvelables, et directeur d'Adnoc, la compagnie pétrolière nationale, le tout juste quinquagénaire a œuvré, tout au long de sa carrière, à faire de son pays une superpuissance énergétique à deux têtes.

D'après une enquête de la BBC publiée lundi, s'il est question lors de cette COP28 de donner un coup d'accélérateur aux énergies propres, son équipe aurait aussi profité de la préparation du sommet pour prospecter de nouveaux marchés dans les 2NERGIES fossiles.

Alors que seule une réduction drastique et rapide de notre dépendance aux hydrocarbures permettra d'enrayer la hausse des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique, comme le martèle le dernier rapport du GIEC, la casquette de pétrolier de Sultan al-Jaber fait de l'ombre aux enjeux de cette COP cruciale.

Mais elle met en lumière sur la complexité de la transition attendue des pays pétrogaziers.
=== fin de citation

De même, la participation du PDG de Total à la tribune ci-dessus a attiré les foudres.

Dans les deux cas (cette tribune et la COP28) l'implication de dirigeants d'entreprises pétrolières est en passe de décrédibiliser les actions menées.

> Le secteur européen de l'aviation et l'IATA se réjouissent de l'adoption de l'objectif intermédiaire de décarbonation

(source Air & Cosmos) 24 novembre - Dans le cadre de la troisième "Conférence sur les carburants d'aviation alternatifs" (CAAF/3) réunie récemment à Dubaï, les États membres de l'OACI (Organisation de l'Aviation Civile Internationale) ont adopté une résolution imposant que les carburants d'aviation émettent 5% de moins que les carburants fossiles à l'horizon 2030. Cette étape intermédiaire est nécessaire pour atteindre le "LTAG" (Long Term Aspirational Goal") adopté durant la dernière Assemblée Générale de l'OACI et qui vise l'objectif de 2050 pour que le secteur de l'aviation internationale atteigne le "0% émissions" par différent moyens.
 
Suite à cette adoption, les cinq associations principales européennes représentant les compagnies aériennes, les aéroports et les fournisseurs de services pour la navigation aérienne et l'industrie aéronautique se sont réjouies, en saluant une étape importante. Il s'agit des associations A4E (Airlines For Europe), ACI Europe (la branche européenne du Conseil international des Aéroports), ASD (Association européenne des industries de l'Aérospatial, la Sécurité et de Défense), CANSO Europe (Organisation des Services de la Navigation aérienne civile), ERA (Association des compagnies régionales européennes).
 
Les conclusions de la CAAF/3 ont aussi été saluées par l'IATA (Association internationale de Transport Aérien). "Les gouvernements ont compris le rôle critique des SAF pour l'atteinte de l'objectif d'élimination des émissions nettes de l'aviation d'ici 2050. Les résultats de la CAAF/3 ajoutent une vision ambitieuse pour un horizon plus rapproché de 2030", a déclaré Willie Walsh, directeur général de l'IATA. "Il n'y pas de temps à perdre. L'IATA attend maintenant des gouvernements qu'ils mettent en place les politiques les plus fortes possibles pour libérer le plein potentiel d'un marché mondial des SAF, avec une augmentation exponentielle de la production", a-t-il ajouté.

Mon commentaire : L'art de se tirer une balle dans le pied !

Ayant des doutes sur la traduction de la résolution de l'OACI, je suis allé à la source. Voici le texte original, en anglais.

The Third International Civil Aviation Organization (ICAO) Conference on Aviation and Alternative Fuels agreed to “strive to achieve a collective global aspirational Vision” to reduce carbon dioxide (CO2) emissions in international aviation by 5% by 2030, compared to “zero cleaner energy use.”

Les traductions automatiques (Google, Deepl) buttent sur la phrase "zero cleaner energy use.” (je vous épargne les traductions, incompréhensibles).

En parcourant nouvelles.paxeditions com, mes craintes ont été confirmées. Voici comment est exposée la résolution de l'OACI :

Un cadre mondial pour promouvoir la production de carburants d’aviation durables (SAF) dans toutes les régions du monde. L’objectif pour 2030 est que le carburant d’aviation soit 5 % plus faible en carbone que les carburants fossiles utilisés actuellement par l’industrie.

En clair, les compagnies aériennes se sont engagées à mettre 5% de carburant d'aviation durable dans les réservoirs de leurs avions, sans s'engager sur une limitation de leur consommation de kérosène.

Les critiquessuivantes, émises suite à l'Assemblée Générale de l'OACI (en octobre 2022) sont toujours d'actualité :

=== source actu-environnement
« La décision de l'assemblée générale montre que l'OACI continue d'adopter des mesures bénéfiques pour l'industrie, mais pas pour le climat, s'insurge Jo Dardenne, directrice du programme aviation de Transport & Environnement. 

Les États membres, en particulier ceux de l'Union européenne, doivent ouvrir les yeux et avancer vers l'adoption de véritables mesures écologiques. »
=== fin de citation


Il m'appartient de signaler que le groupe Air France-KLM s'est fixé des objectifs plus ambitieux :

  • +10% d'utilisation de carburant d'aviation durable (SAF) d’ici 2030

  • -30% d'émissions de CO2 par passager/km à l’horizon 2030 par rapport à 2019

Ainsi, sauf dans le cas fort improbable où l'activité d'Air France-KLM progresserait de 30% d'ici 2030, le groupe franco-néerlandais émettra bien moins de CO² en 2030 qu'en 2019.


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Spécial Aviation durable
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> Moins de traînées de condensation durables en modifiant l'altitude des avions

(source DPA) 11 décembre - Les traînées de condensation durables des avions peuvent souvent être évitées en modifiant légèrement l'altitude de vol. C'est ce qu'ont démontré des collaborateurs du Centre aérospatial allemand (DLR) à Koln et du Maastricht Upper Area Control Centre (MUAC) d'Eurocontrol en réalisant une expérience pendant la pandémie Corona. Il s'agit d'une étape importante pour réduire considérablement l'impact climatique du trafic aérien à long terme, ont fait savoir le DLR et le MUAC.
 
Pour leurs recherches, les chercheurs ont utilisé la situation pendant la pandémie de 2021, lorsqu'il y avait moins de trafic aérien. Durant cette période, ils ont étudié la formation de traînées de condensation dans l'espace aérien supérieur au-dessus du nord-ouest de l'Allemagne et des pays du Benelux.
 
Selon le DLR, les traînées de condensation se forment lorsque les moteurs d'avion rejettent des particules de suie qui, à des altitudes typiques de vol, agissent souvent comme des germes de condensation pour de petites gouttes d'eau. Celles-ci se congèlent ensuite en cristaux de glace, visibles dans le ciel sous forme de traînées de condensation blanches. Selon les auteurs de l'étude, le fait que cela se produise ou non, et dans quelle mesure, dépend entre autres de la température et de l'humidité de l'air sur la route du vol.
 
Lorsque les prévisions météorologiques laissaient présager la présence de traînées de condensation durables à l'altitude de vol habituelle, l'itinéraire a été maintenu certains jours, tandis que d'autres jours, une "procédure d'évitement" a été mise en œuvre. Concrètement, l'altitude de vol des avions était alors modifiée d'environ 660 mètres vers le haut ou vers le bas.
 
Les chercheurs ont utilisé des images satellites pour vérifier si des traînées de condensation durables s'étaient formées ou non. Les vols effectués les jours où le trafic aérien n'était pas perturbé ont servi de référence. Le résultat a montré que les traînées de condensation durables étaient effectivement moins fréquentes lorsque l'altitude de vol était modifiée, rapporte l'équipe de Robert Sausen de l'Institut de physique de l'atmosphère du DLR et de Rüdiger Ehrmanntraut du MUAC dans la "Meteorologische Zeitschrift".

Toutefois, la modification des itinéraires de vol entraîne généralement une augmentation des émissions de CO2. Les itinéraires doivent donc être choisis de manière à réduire l'impact climatique global du vol concerné, écrit le DLR. Il faut en outre garantir que l'ensemble du trafic aérien puisse continuer à se dérouler en toute sécurité

Mon commentaire : La baisse d'activité du transport aérien durant la période Covid a permis de tester différentes pistes de baisse d'émissions de CO2.

Outre les possibilités de diminution des trainées de condensation, les vols en escadrille, la modification des trajectoires, la descente en continue ont été évaluées.

Vous retrouverez  dans ma lettre n°835 du 22 novembre 2021 diverses infographies réalisées par l'équipe d'OMNES, dont celle-ci et celle figurant dans le prochain commentaire.

aviationdurable

> Carburants d'aviation durables: nouvel appel à projets doté de 200 millions d'euros

(source AOF) 15 décembre - "Soutenir des projets de production industrielle de carburants d’aviation durables en France". C’est l’objectif du nouvel appel à projets lancé ce vendredi par les ministres Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), Roland Lescure (Industrie), Clément Beaune (Transports), avec Bruno Bonnell, secrétaire général pour l’investissement, en charge de France 2030. Doté d’une enveloppe prévisionnelle pouvant aller jusqu’à 200 millions d'euros, ce dispositif fait suite à l’annonce du président de la République au Salon du Bourget en juin 2023.
 
Emmanuel Macron a alors promis le soutien de l'État pour le développement d'une filière nationale capable de produire 500.000 tonnes par an à l'horizon 2030.
 
Selon l'exécutif, l'objectif est de "permettre au secteur aérien d'atteindre ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de décarbonation en 2050", tout en préservant l'indépendance énergétique du pays et en créant des emplois dans les territoires en lien avec nos filières agricoles et de déchets.
 
Les carburants durables, biocarburants issus de biomasse ou carburants de synthèse (e-fuels), peuvent permettre des gains d'émissions de gaz à effets de serre de 70% à 95% sur l'ensemble de leur cycle de vie par rapport au kérosène fossile.

Mon commentaire : Cet appel à projets répond aux craintes des compagnies aériennes qui déplorent le manque de carburant durable mis à leur disposition.

Si la filière française parvient comme évoqué à produire 500.000 tonnes de carburants d’aviation durables en 2030, cela permettra aux compagnies aériennes françaises de respecter leurs objectifs sur ce point. 

aviationdurable

> Séisme dans le commerce mondial : la Chine interdit l'exportation de technologies liées aux métaux stratégiques

(source La Tribune) 21 décembre - La menace se faisait sentir depuis plusieurs mois. Après avoir déjà conditionné l'exportation de deux métaux stratégiques (gallium et germanium), à l'aval du gouvernement central, la Chine a annoncé jeudi qu'elle allait stopper l'exportation d'une série de technologies liées à l'extraction des terres rares. Un tournant dans l'histoire du commerce mondial.
 
Et pour cause, ces métaux sont indispensables pour le développement de nombreuses technologies (batteries électriques, puces, smartphones, écrans LCD, Internet, éoliennes, et équipements militaires...). Pour rappel, les terres rares sont un ensemble de 17 éléments utilisés dans des produits technologiques de pointe. Leur extraction est donc capitale.
 
En clair, sur fond de rivalité croissante avec les États-Unis, l'Empire du Milieu va priver ses partenaires commerciaux de plusieurs matériaux afin de dominer les enjeux d'indépendance technologiques. D'un premier coup de semonce en juillet dernier, avec ce coup d'arrêt, la Chine franchit ainsi une étape. Au global, la seconde économie mondiale, décidée à prendre le leadership, contrôle aujourd'hui environ les trois-quarts de la production de ces terres rares.
 
Concrètement, elle va désormais interdire l'exportation des « technologies d'extraction, de traitement et de fusion des terres rares », selon un long document publié jeudi par le ministère du Commerce. La nouvelle réglementation n'a toutefois pas de conséquences sur les exportations de produits à base de terres rares eux-mêmes. En revanche, elle pourrait contrarier les efforts de développement de ce secteur en dehors de Chine.
 
Contrairement à ce que laisse entendre leur dénomination, cet ensemble de 17 métaux essentiels aux technologies de pointe est relativement abondant. Mais leurs propriétés électromagnétiques particulièrement recherchées en font des « métaux stratégiques ».
 
En 2022, la Chine a extrait 58% de la production mondiale et raffiné 89% de terres rares. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIEA), les besoins en technologies bas-carbone, notamment pour les moteurs de véhicules électriques ou les éoliennes en mer, pourraient multiplier par sept la demande mondiale, d'ici 2040, soit près de 2 millions de tonnes par an, contre 280.000 tonnes en 2022.
 
Aussi, les pays occidentaux, notamment les États-Unis, mais aussi l'Union européenne (UE) considèrent de plus en plus l'approvisionnement de ces métaux comme une question de sécurité nationale, d'autant plus que la transition énergétique mondiale alimente les craintes de pénuries potentielles à l'avenir.
 
Outre les aimants permanents des éoliennes et des voitures électriques, certains des métaux rares entrent dans la composition des écrans de télévision, des drones ou encore des disques durs. En riposte, l'UE pourrait ainsi envisager « des actions dans le cadre de l'OMC ». Mais « l'OMC est une coquille vide car les États-Unis et la Chine prennent des décisions en dehors de cette institution depuis plusieurs années », expliquait à La Tribune Sylvain Bersinger du cabinet d'études Astérès.
 
De son côté, les États-Unis ont annoncé, le même jour, vouloir lancer une enquête auprès de leurs entreprises afin de déterminer comment elles se fournissent en semi-conducteurs fabriqués en Chine.
 
Cette enquête « éclairera la politique américaine visant à renforcer la chaîne d'approvisionnement des semi-conducteurs, à promouvoir des conditions de concurrence équitables pour la production de puces traditionnelles et à réduire les risques pour la sécurité nationale posés par la Chine », a ainsi expliqué dans un communiqué le département du Commerce.
 
L'objectif affiché : que les États-Unis gardent leur avance, « de plusieurs années » sur la Chine dans la conception de semi-conducteurs.
 
« Au cours des dernières années, nous avons constaté des signes potentiels de pratiques inquiétantes de la part de la Chine visant à accroître la production de semi-conducteurs par leurs entreprises et à rendre plus difficile la concurrence pour les entreprises américaines », a également justifié la secrétaire au Commerce, Gina Raimondo, dans le communiqué, faisant référence à un rapport, qui a été rendu le 12 décembre par une commission parlementaire américaine, qui appelle à une « réinitialisation » des relations économiques qu'entretiennent les États-Unis avec la Chine.

Mon commentaire : Tout d'abord une remarque importante : contrairement à ce que pourrait laisser supposer leur nom, les terres rares (17 métaux) ne sont pas rares.

Ensuite, en 2018, le Japon a annoncé avoir découvert au fond de ses eaux l’équivalent de centaines d’années d’approvisionnement mondial de terres rares : 780 ans d’yttrium, 620 ans d’europium, 730 ans de dysprosium... 

Il reste à élaborer les techniques permettant d'exploiter ce gisement situé à 2.200 kilomètres au sud-est de Tokyo dans les eaux territoriales japonaises et à 5.500 mètres de profondeur.

En attendant, les entreprises continueront à être dépendante de la bonne volonté de la Chine.

 
Fin de la revue de presse


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