photo François Robardet, Administrateur Air France-KLM
AG AIR FRANCE-KLM LE 26 MAI 2020
| Flash Info de l'Administrateur Air France-KLM

François Robardet Représentant des salariés et anciens salariés actionnaires PS et PNC

N°83, 1er février 2021
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Recapitalisation : mode d'emploi

Chères lectrices, chers lecteurs

Une recapitalisation désigne une opération par laquelle une entreprise va renforcer ses fonds propres.

Je vous propose, comme je vous l'indiquais la semaine dernière, d'examiner ce type d'opération à travers l’exemple de Lufthansa.

Voici le sommaire de ce flash :
(1) Les fonds propres d'une entreprise
(2) Pourquoi recapitaliser ?
(3) Recapitalisation par augmentation de capital : exemple de Lufthansa
(4) Contreparties à l'opération de recapitalisation de Lufthansa

Merci pour votre fidélité
François
Continuons à respecter les mesures de confinement

> Les fonds propres d'une entreprise

Précisions sur les fonds propres : (évoquées dans ma lettre 778, source : droit-finances_com)

Les fonds propres sont un terme issu du langage comptable et financier qui désigne les capitaux propres apportés par les actionnaires d'une société. Ces fonds propres sont apportés sous forme de somme d'argent au moment de la constitution de la société ou ultérieurement. Il peut aussi s'agir des dividendes non redistribués et laissés à disposition de la société. Le rôle des fonds propres est double. D'une part, ils servent à financer une partie de l'investissement. D'autre part, ils servent de garantie aux créanciers de la société qui acceptent de financer l'autre partie de l'investissement.

Pour faire simple, le capital social d'une entreprise représente les fonds apportés lors de sa création. Les fonds propres sont initialement égaux au capital social. Puis, année après année, on y ajoute (entre autres) les bénéfices et les pertes. Lorsqu'une entreprise enchaine les années déficitaires, elle diminue ses fonds propres.

Dans la situation actuelle, les compagnies aériennes enregistrent des pertes qui viennent diminuer considérablement leurs fonds propres.

> Pourquoi recapitaliser ?

Quand les fonds propres d'une entreprise sont inférieurs à la moitié du capital social, cela signifie qu'elle n'a plus les moyens de financer ses investissements ou son cycle d'exploitation. Elle peut alors décider soit de dissoudre l'entreprise soit de poursuivre son activité pendant deux ans (c'est le maximum permis par la réglementation) pour lui laisser le temps de reconstituer ses fonds propres.

Pour la deuxième solution, la société peut effectuer une augmentation de capital, soit trouver des solutions permettant de dégager des profits suffisants pour atteindre le niveau de fonds propres précédent (source journaldunet)

> Recapitalisation par augmentation de capital : exemple de Lufthansa (DLH)

Fin mai 2020 (voir ma lettre 758) un accord était trouvé entre Berlin et Bruxelles pour le plan de sauvetage de Lufthansa, à hauteur de 9 milliards d'euros. Il comportait un volet de recapitalisation de 6 milliards d'euros.

Dans un document public (presscorner/detail/fr/ip_20_1179), la Commission Européenne détaille ce plan :

La mesure de recapitalisation allemande
L'Allemagne a notifié à la Commission, au titre de l'encadrement temporaire, une recapitalisation de DLH [Lufthansa] à hauteur de 6 milliards €. Le plan comprend:
(i) une participation au capital de 300 millions € par la souscription de nouvelles actions par l'État, ce qui correspond à 20 % du capital social de DLH [Lufthansa] ;
(ii) une participation tacite de 4,7 milliards € qui a les caractéristiques d'un instrument de fonds propres non convertible; et
(iii) une participation tacite de 1 milliard € qui a les caractéristiques d'un instrument d'emprunt convertible;

Mon commentaire : Contrairement aux idées reçues, l'émission de nouvelles actions a représenté une infime part de l'opération de recapitalisation (300 millions d'euros sur 6 milliards d'euros, soit 5% du total de l'opération). La dilution des actionnaires a donc été relativement faible.

En complément, l'Allemagne a garanti un prêt de 3 milliards d'euros.

> Contreparties à l'opération de recapitalisation de Lufthansa

De nombreuses contreparties ont été imposées à Lufthansa. Sept d'entre elles sont présentées dans le document de la Commission Européenne

(i) Conditions relatives à la nécessité, au caractère approprié et à la taille de l'intervention:
La mesure ne dépassera pas le minimum nécessaire pour garantir la viabilité de DLH et rétablir la situation de fonds propres qui était la sienne avant la pandémie de COVID-19. Lors de l'évaluation de la proportionnalité de la mesure de recapitalisation, la Commission a pris en compte les besoins de fonds propres et de liquidités de DLH au niveau du groupe.
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(ii) Conditions relatives à l'entrée de l'État dans le capital des entreprises et à la rémunération:
L'aide à la recapitalisation permettra d'éviter l'insolvabilité de DLH, qui aurait de graves conséquences sur l'emploi, la connectivité et les volumes du commerce extérieur de l'Allemagne. L'État recevra une rémunération appropriée pour l'investissement, et des mécanismes supplémentaires sont prévus pour inciter DLH à racheter la prise de participation de l'État et les participations tacites.
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(iii) Conditions relatives à la sortie de l'État du capital des entreprises concernées:
L'Allemagne a présenté un plan d'entreprise élaboré par DLH visant à rembourser, d'ici 2026, tant le prêt que les instruments de recapitalisation. L'Allemagne s'est également engagée à élaborer une stratégie de sortie crédible dans un délai de 12 mois à compter de l'octroi de l'aide, à moins que l'intervention de l'État ne soit ramenée à un niveau inférieur à 25 % des fonds propres d'ici là. En présence de doutes quant à la sortie de l'État six ans après la réception de l'aide à la recapitalisation, un plan de restructuration de DLH sera notifié à la Commission.
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(iv) Conditions relatives à la gouvernance:
Jusqu'à la sortie complète de l'État du capital, DLH est soumis à une interdiction de dividendes et de rachats d'actions. En outre, tant qu'au moins 75 % de la recapitalisation ne sont pas remboursés, une limitation stricte de la rémunération des membres de leur direction s'applique, y compris une interdiction du versement de bonus. Ces conditions visent également à inciter DLH et ses propriétaires à racheter les actions détenues par l'État dès que la situation économique le permet.
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(v) Interdiction des subventions croisées et des acquisitions:
Pour faire en sorte que DLH ne bénéficie pas indûment des aides à la recapitalisation octroyées par l'État au détriment de l'exercice d'une concurrence équitable dans le marché unique, il lui est interdit d'utiliser les aides pour soutenir des activités économiques de sociétés intégrées qui se trouvaient en difficultés financières avant le 31 décembre 2019. En outre, tant qu'au moins 75 % de la recapitalisation ne sont pas remboursés, il est en principe interdit à DLH d'acquérir une participation supérieure à 10 % chez des concurrents ou d'autres acteurs de la même ligne d'activité.
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(vi) Engagements visant à préserver l'exercice d'une concurrence effective:
DLH, qui bénéficiera d'une mesure de recapitalisation de plus de 250 millions d'euros, détient un pouvoir de marché significatif sur les marchés concernés où elle exerce ses activités. Avant la pandémie de COVID-19, ses aéroports pivots de Munich et de Francfort étaient saturés, avec pour effet qu'elle ne disposait pas de suffisamment de créneaux d'atterrissage et de décollage. Par conséquent, conformément aux exigences de l'encadrement temporaire, des mesures supplémentaires visant à préserver l'exercice d'une concurrence effective s'imposent. Il s'agit de la cession de jusqu'à 24 créneaux par jour dans les aéroports pivots de Francfort et de Munich et d'actifs supplémentaires connexes afin de permettre aux transporteurs concurrents de baser quatre aéronefs maximum dans chacun de ces aéroports. Ces mesures permettraient une entrée ou un élargissement viables des activités d'autres compagnies aériennes dans ces aéroports, au bénéfice des consommateurs et d'une concurrence effective.
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(vii) Transparence publique et information:
DLH devra publier des informations sur l'utilisation des aides reçues, y compris sur la manière dont les aides reçues soutiennent les activités de l'entreprise, conformément aux obligations nationales et aux obligations de l'UE en matière de transformation écologique et numérique.

Mon commentaire : Deux points retiennent particulièrement mon attention.

Le premier concerne l'interdiction des subventions croisées. Les filiales de Lufthansa en difficultés avant la crise sanitaire ne pouvaient pas bénéficier de ces aides.

Brussels Airlines, Swiss et Austrian n'étaient pas concernées. Elles ont toutes les trois bénéficié de mesures d'aides de leurs états et de Lufthansa.
Ainsi, Lufthansa a fourni à Swiss 200 millions de francs suisses en liquidités, a procédé à une injonction de capital de 170 millions d'euros dans Brussels Airlines et de 150 millions d'euros dans Austrian. 

Le second point concerne la préservation de l'exercice de la concurrence. Sur les deux aéroports principaux de Lufthansa, à saturation avant la crise (Munich et Francfort), la compagnie allemande devra céder des créneaux de manière à permettre à des transporteurs concurrents de baser jusqu'à quatre avions sur chacun de ces deux aéroports.


Fin du Flash

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A bientôt.

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